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Testo originale e tradotto della sentenza selezionata

AFFAIRE KOKTEPE c. TURQUIE

Tipologia: Sentenza
Importanza: 2
Articoli: 41, 35, 29, P1-1
Numero: 35785/03/2008
Stato: Turchia
Data: 22/07/2008
Organo: Sezione Seconda
Testo Originale

Violation de P1-1 ; Partiellement irrecevable ; Satisfaction équitable réservée
ANCIENNE DEUXIÈME SECTION
AFFAIRE KÖKTEPE c. TURQUIE
(Requête no 35785/03)
ARRÊT
(fond)
STRASBOURG
22 juillet 2008
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l'article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l'affaire Köktepe c. Turquie,
La Cour européenne des droits de l'homme (ancienne deuxième section), siégeant en une chambre composée de :
Françoise Tulkens, présidente,
Antonella Mularoni,
Ireneu Cabral Barreto,
Riza Türmen,
Vladimiro Zagrebelsky,
Danute Jociene,
Dragoljub Popovic, juges,
et de Sally Dollé, greffière de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 22 avril 2008 et le 17 juin 2008,
Rend l'arrêt que voici, adopté à cette dernière date :
PROCÉDURE
1. A l'origine de l'affaire se trouve une requête (no 35785/03) dirigée contre la République de Turquie et dont un ressortissant de cet Etat, M. H. I. K. (« le requérant »), a saisi la Cour le 17 octobre 2003 en vertu de l'article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).
2. Le requérant a été représenté par Me M. Ö., avocat à Çanakkale. Le gouvernement turc (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent.
3. Le requérant alléguait la violation de l'article 1 du Protocole no 1.
4. Le 8 novembre 2005, la Cour a décidé de communiquer la requête au Gouvernement. Comme le permet l'article 29 § 3 de la Convention, elle a décidé que seraient examinés en même temps la recevabilité et le bien-fondé de l'affaire.
5. Tant le requérant que le Gouvernement ont déposé des observations écrites complémentaires (article 59 § 1 du règlement).
6. Une audience s'est déroulée en public au Palais des droits de l'homme, à Strasbourg, le 22 avril 2008 (article 59 § 3 du règlement).
Ont comparu :
– pour le Gouvernement
MM. A.M. Özmen, co-agent,
H.T. Ceyhan,
A. Demir,
Mmes E. Demir,
A. Emüler,
V. Sirmen,
S. Pala,
E. Esin,
Ö. Gazialem,
H. Ardor, conseillers ;
– pour le requérant
M. M. Ö., conseil,
M. H.I. K., requérant.
La Cour a entendu en leurs déclarations MM. Özmen et Ö..
EN FAIT
I. LES CIRCONSTANCES DE L'ESPÈCE
7. Le requérant est né en 1955 et réside à Çanakkale.
A. La procédure relative à la qualification de « domaine forestier public » donnée au terrain du requérant
8. Le 30 janvier 1953, le Trésor public vendit à un particulier un terrain de 21 200 m² sis à Saricali (Çanakkale), sur décison de la commission des terres (Toprak Komisyonu) du 15 juin 1952. La vente se réalisa dans le cadre d'un programme qui avait pour objectif de faire accéder les paysans à la propriété. Le terrain fut inscrit au nom du particulier en question sur le registre foncier (parcelle no 745) ; il était qualifié de champ agricole (tarla).
9. De 1953 à 1993, le terrain changea de propriétaire à quatre reprises. Le 26 juillet 1993, le requérant en fit l'acquisition. Comme aux trois acquéreurs précédents, un titre de propriété lui fut remis par la Direction générale des titres et du cadastre.
10. Entre-temps, le 24 août 1990, la commission cadastrale avait procédé à la délimitation du domaine forestier public, mesure à l'issue de laquelle cette parcelle avait été, pour partie (la partie nord, signalée sur les croquis par les points 20 à 24), intégrée dans les limites du domaine forestier public. D'après les éléments du dossier, les conclusions de la commission avaient été rendues publiques le 19 novembre 1990, mais aucune mention n'avait à l'époque été portée sur le registre foncier.
11. Le 17 juillet 1996, le requérant saisit le tribunal de grande instance de Çanakkale (« le tribunal ») d'un recours contre la décision de la Direction générale des forêts portant délimitation des domaines forestiers. Il soutint que l'acte de la commission cadastrale était entaché d'erreur.
12. Le tribunal, ainsi que des experts (dans les domaines agricole, forestier et technique), des représentants des parties au litige et des témoins locaux se déplacèrent sur le terrain litigieux à des fins d'expertise, et ce à plusieurs reprises.
13. Le premier examen des lieux se déroula le 10 octobre 1997. Le 17 octobre 1997, le rapport d'expertise établi par l'expert forestier fut versé au dossier. L'expert y relevait que la commission cadastrale avait délimité le terrain par les signes de démarcation nos 19 à 25 et que la partie A du terrain était considérée comme « hors forêt » alors que la partie B était considérée comme faisant partie du domaine forestier public. Il constatait qu'à l'époque des faits le terrain n'avait pas de « couverture forestière » mais que d'après les éléments du dossier no 1995/205, pendant devant le tribunal d'instance pénale de Çanakkale, le requérant était poursuivi pour avoir effectué des travaux visant à supprimer la « couverture forestière ». Il observait également que le terrain était couvert de maquis par endroits. Il concluait que la totalité du terrain litigieux faisait partie du domaine forestier public.
14. Le 30 octobre 1997, l'expert agricole versa son rapport au dossier. Il y notait qu'aucune culture agricole n'avait été faite sur le terrain depuis longtemps, constatait un dénivelé de 15-20 % et concluait que la nature du terrain conférait à celui-ci les caractéristiques d'un pâturage.
15. Le 16 décembre 1997, le requérant fit opposition à ces rapports et demanda une nouvelle expertise.
16. Lors de l'expertise du 12 avril 1998, trois experts forestiers, un expert agricole et un expert technique examinèrent le terrain litigieux à la lumière de photographies aériennes, de la carte du pays et du plan d'aménagement, en présence notamment du représentant du requérant.
17. Dans son rapport du 28 mai 1998, l'expert agricole constatait que le terrain litigieux devait être considéré comme un champ agricole même s'il était représenté en vert sur la carte du pays de 1957. Il notait qu'il s'agissait de maquis et de broussailles. La carte ne fut pas versée au dossier car il était interdit d'en tirer des photocopies. En ce qui concerne le dénivelé, l'expert constatait que dans la partie A il était de 8-10 % tandis que dans la partie B il s'élevait à 18-20 %.
18. Le 14 juillet 1998, le collège de trois experts forestiers établit son rapport en se fondant sur la carte du pays, sur une photographie aérienne non versée au dossier (sa photocopie étant interdite), sur le plan d'aménagement forestier ainsi que sur le plan et le procès-verbal du cadastre forestier. Le collège se référa en outre à une décision rendue le 22 mars 1996 par la chambre d'harmonisation jurisprudentielle de la Cour de cassation, suivant laquelle les titres de propriété accordés en 1953 étaient valables dès lors que la zone litigieuse était constituée, à l'époque pertinente, de maquis et de broussailles et n'était pas considérée comme un domaine forestier public. Quant au dénivelé, le collège constata que celui-ci s'élevait à 6-10 % dans la partie A et à 15-20 % dans la partie B. Au vu de l'ensemble de ces éléments, le rapport d'expertise concluait, à la majorité, que le terrain litigieux ne relevait pas du domaine forestier. Dans son opinion dissidente, M.K., l'un des experts forestiers, estimait que le terrain litigieux devait être considéré comme faisant partie du domaine forestier public et que le collège d'experts n'avait pas à invoquer l'arrêt de la Cour de cassation.
19. Dans leur rapport additionnel du 13 avril 1999, les experts précisèrent qu'une partie du terrain litigieux (soit 13 625 m²) était couverte de maquis et de broussailles tandis que l'autre (soit 7 525 m²) était constituée d'un champ agricole.
20. Le 1er septembre 1999, le requérant versa au dossier ses observations sur le rapport d'expertise, notamment sur l'opinion dissidente.
21. Le 30 juin 2000, un nouveau rapport d'expertise fut établi par un autre collège de trois experts. Le rapport concluait, comme la commission de délimitation, que le terrain litigieux relevait partiellement du domaine forestier.
22. Le 16 novembre 2000, le tribunal constata la divergence des conclusions des expertises versées au dossier. Toutefois, il estima que la décision de la chambre d'harmonisation jurisprudentielle de la Cour de cassation n'était pas de nature à influer sur une expertise telle que celle effectuée sur la base de cartes. Statuant à la lumière des conclusions du rapport d'expertise selon lequel le terrain litigieux relevait partiellement du domaine forestier, le tribunal souligna que les domaines, à l'origine forestiers, étaient insusceptibles d'acquisition et en conséquence rejeta la demande du requérant.
23. Le 6 août 2003, le requérant se pourvut en cassation. Il estimait que les expertises effectuées en première instance présentaient des carences dès lors qu'elles ne s'étaient pas fondées sur des plans, des photographies de vues aériennes et des plans d'aménagement antérieurs à 1945.
24. Le 29 janvier 2004, la Cour de cassation rejeta ce pourvoi et confirma la décision de première instance. Elle souligna qu'au vu des éléments de preuve recueillis et du contenu du dossier, le litige concernait la délimitation du terrain concerné dans le cadre de la loi no 6831, et qu'aucun élément ne permettait d'établir que la commission de délimitation avait qualifié le terrain de maquis, au sens de la loi no 5653 sur les forêts. Or, en vertu de la décision de la chambre d'harmonisation jurisprudentielle de la Cour de cassation, seuls les terrains considérés comme maquis pouvaient avoir une valeur. Elle constata également que le dénivelé avait été mesuré à 18 % et que, dès lors que ce niveau dépassait 12 %, le terrain devait être considéré comme étant de la forêt.
25. Le 2 juillet 2004, la Cour de cassation rejeta le recours en rectification formé par le requérant.
B. La procédure pénale ayant abouti à la condamnation du requérant
26. Le 17 mars 1995, le procureur de la République de Çanakkale inculpa le requérant ainsi que d'autres personnes pour avoir, le 22 février 1995, déboisé sans autorisation, à l'aide d'un bulldozer, une partie (9 280 m²) du terrain sis à Saricali (Çanakkale) et enregistré au nom du requérant sur le registre foncier (parcelle no 745).
27. Le 19 novembre 1996, le requérant fut relaxé par la juridiction pénale de première instance de Çanakkale (« le tribunal pénal »).
28. Le 24 décembre 1997, la Cour de cassation infirma le jugement de première instance.
29. Entre-temps, le 18 janvier 1996, le procureur de la République de Çanakkale avait à nouveau inculpé le requérant, cette fois pour avoir cultivé du blé, le 23 décembre 1995, sur le terrain déboisé.
30. A une date non précisée, le tribunal décida de joindre les deux affaires et d'attendre l'issue de la procédure civile au sujet de la délimitation du terrain, pendante devant le tribunal de grande instance de Çanakkale, dont le jugement devint définitif le 2 juillet 2004.
31. Le 13 décembre 2005, le tribunal pénal condamna le requérant, à deux reprises, à une peine d'un an et trois mois d'emprisonnement, en vertu de l'article 93 §§ 1-3 de la loi no 6831 sur les forêts. Il décida de surseoir à l'exécution de ces peines pour une durée de trois ans, en application de l'article 55 §§ 1 et 3 du code pénal, entré en vigueur le 1er juin 2005. Il fonda son jugement notamment sur les arguments suivants :
« Bien que l'accusé H. I. [K.] ait acheté le terrain litigieux et l'ait fait inscrire à son nom sur le registre foncier, il est clair qu'il avait connaissance de la restriction forestière qui était devenue définitive en 1991, ainsi que l'a constaté la Cour de cassation dans son arrêt d'infirmation. On ne saurait avancer que l'intéressé a déboisé de bonne foi, dès lors que la restriction forestière a pour effet d'invalider le titre de propriété et que l'intéressé devait le savoir. Sa défense fondée sur le caractère non intentionnel de l'infraction ne tient pas, vu notamment qu'il a cultivé du blé sur le terrain litigieux après qu'un procès-verbal constatant l'infraction avait été établi à son encontre et qu'il avait lui-même intenté une action en annulation devant le tribunal civil.
Quant aux critiques concernant la perte de validité juridique du titre de propriété, elles n'entrent pas dans le cadre de l'examen de la cause par notre tribunal. Le tribunal compétent sur ce point a rendu sa décision, laquelle a été approuvée par la Cour de cassation. C'est pourquoi le présent tribunal ne saurait à ce stade examiner la conformité juridique de la restriction forestière, et donc la validité juridique du titre de propriété de l'accusé. La question dont est saisi le tribunal est l'élément intentionnel, c'est-à-dire le point de savoir si l'accusé avait une intention délictueuse ; comme il été expliqué plus haut, le seul fait de s'adresser au tribunal civil n'ayant pas pour effet d'annihiler l'élément intentionnel de l'infraction, le présent tribunal parvient à la conclusion qu'il y a lieu de sanctionner H. I. [K.], qui dans les deux cas a agi avec l'élément intentionnel de l'infraction ».
32. Par un arrêt du 4 février 2008, notifié le 28 mai 2008, la Cour de cassation rejeta le pourvoi du requérant.
C. La procédure relative à l'annulation du titre de propriété du requérant et à son inscription au registre foncier au nom du Trésor public
33. Le 28 septembre 2007, le ministère des Forêts intenta devant le tribunal cadastral de grande instance de Çanakkale (« le tribunal ») une action en vue de l'annulation du titre de propriété du requérant sur le terrain litigieux et de l'inscription de celui-ci au nom du Trésor public sur le registre foncier. Il demanda également des mesures provisoires afin d'empêcher le transfert du terrain à des tiers.
34. Le même jour, le tribunal accueillit la demande de mesures provisoires et ordonna à la Direction des registres fonciers d'apposer à ce sujet une mention dans les registres.
35. Lors de l'audience devant la Cour européenne des droits de l'homme du 22 avril 2008, il a été précisé que la procédure était toujours pendante devant le tribunal et que la prochaine audience était prévue pour le 2 juillet 2008.
II. LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS
A. Les dispositions constitutionnelles
36. L'article 74 de la Constitution turque de 1924 se lit comme suit :
« Nul ne peut se voir exproprier de ses biens, excepté si l'interêt public est constaté selon une procédure régulière et sous réserve d'indemnisation préalable.
Les modalités d'évolution des contreparties à l'expropriation des terres et des forêts et du règlement des contreparties, aux fins de rendre propriétaires les cultivateurs et de nationaliser les forêts, sont définies par des lois spéciales ».
37. Les dispositions pertinentes de la Constitution turque de 1982 sont ainsi libellées :
« XII. Droit de propriété
ARTICLE 35 : Chacun possède les droits de propriété et d'héritage. Ces droits peuvent être limités par la loi, mais uniquement dans un but d'intérêt public. Le droit de propriété ne peut être exercé d'une manière contraire à l'intérêt de la société.
(...)
D. Expropriation
ARTICLE 46 [modifié par la loi no 4709 du 3 octobre 2001] : L'Etat et les personnes morales publiques sont autorisées, dans les cas où l'intérêt public le rend nécessaire et à condition d'en payer la contrepartie réelle au comptant, à exproprier, en tout ou en partie, les biens immobiliers appartenant à des particuliers, ou à établir sur ces biens des servitudes administratives, conformément aux règles et procédures fixées par la loi.
L'indemnité d'expropriation et l'indemnité de plus-value fixée par une décision passée en force de chose jugée sont payées en espèces et au comptant. Toutefois, la loi fixe le mode de paiement des indemnités dues en raison de l'expropriation de terres dans le cadre de l'application de la réforme agraire, de la réalisation de grands projets en matière d'énergie et d'irrigation, de la réalisation de projets de logement, de la plantation de nouvelles forêts, de la protection des rivages et des expropriations faites à des fins touristiques. Dans ces cas, la loi peut prévoir un paiement par tranches, mais le délai de paiement ne peut pas dépasser cinq ans ; le cas échéant, les tranches de paiement seront égales.
La contre-valeur de la partie des terres expropriées appartenant à de petits cultivateurs les exploitant directement est en tout cas payée au comptant.
Les tranches de paiement, dans le cas prévu à l'alinéa 2, et les indemnités d'expropriation restant dues, quelle qu'en soit la cause, seront majorées d'intérêts au taux le plus élevé applicable aux dettes publiques.
E. Nationalisation et privatisation
ARTICLE 47 [modifié par la loi no 4446 du 13 août 1999] : Les entreprises privées ayant le caractère d'un service public peuvent être nationalisées dans les cas où l'intérêt public l'exige.
La nationalisation est effectuée sur la base de la contre-valeur réelle. La loi définit le mode et la procédure de calcul de cette contre-valeur.
Les principes et procédures relatifs à la privatisation des entreprises et richesses appartenant à l'Etat, aux entreprises économiques publiques et aux autres personnes morales publiques sont fixés par la loi.
La loi détermine quels investissements et services fournis par l'Etat, les entreprises économiques publiques et les autres personnes morales publiques peuvent être confiés ou cédés à des personnes physiques ou morales en vertu de contrats de droit privé.
(...)
IV. Forêts et paysans des régions forestières
A. Préservation et développement des forêts
ARTICLE 169 : L'Etat adopte les lois et les mesures nécessaires en vue de préserver les forêts et d'agrandir les zones forestières. Il procède au reboisement des espaces forestiers incendiés, où il est interdit de se livrer à une forme quelconque d'agriculture ou d'élevage. Toutes les forêts sont placées sous la garde de l'Etat.
La propriété des forêts d'Etat est inaliénable. L'Etat gère et exploite ces forêts conformément à la loi. Elles ne peuvent faire l'objet d'une prescription acquisitive et ne peuvent être frappées de servitude, sauf dans l'intérêt public.
Nul acte ou activité de nature à causer préjudice aux forêts ne peut être autorisé. On ne peut faire de propagande politique susceptible d'entraîner la destruction des forêts, ni décréter d'amnistie générale ou particulière visant exclusivement les infractions en matière forestière. Les lois d'amnistie générale et particulière ne peuvent pas inclure les infractions commises dans le but d'incendier ou de détruire une forêt ou de réduire une zone forestière.
Les limites des forêts ne peuvent être reculées, sauf en ce qui concerne, d'une part, les zones dont le maintien en tant que forêts ne présente aucun intérêt scientifique, théorique ou pratique, mais pour lesquelles il est au contraire établi qu'il y a un intérêt certain à les transformer en zones agricoles, ainsi que les terrains qui, avant le 31 décembre 1981, ont intégralement perdu le caractère de forêts sur le plan scientifique, tant du point de vue théorique que pratique, et pour lesquels il a été constaté qu'il y avait un intérêt à les exploiter à des fins agricoles variées, par exemple en tant que champs, vignobles, vergers, oliveraies ou en vue de l'élevage, et, d'autre part, les secteurs des villes, bourgades et villages où les habitations sont concentrées. »
B. Le code civil
38. Les dispositions pertinentes du code civil turc se lisent comme suit :
Article 683 § 1 : « Quiconque possède une chose peut l'utiliser, en jouir et en disposer comme il le souhaite, dans les limites du sytème juridique. »
Article 705 § 1 : « L'acquisition du bien immobilier se réalise par l'inscription. »
Article 1007 § 1 : « L'Etat est responsable de tout dommage résultant de la tenue des registres fonciers ».
C. Les lois sur les forêts
39. Jusqu'en 1937, les forêts ne faisaient l'objet d'aucune réglementation spéciale. Entre le 3 février 1937 et le 31 août 1956, cinq lois principales concernant le domaine forestier furent promulguées : les lois nos 3116 (1937), 4785 (1945), 5653 (1950), 5658 (1950) et 6831 (1956).
1. La loi no 3116 du 8 février 1937
40. L'article 1 de cette loi définit la notion de « forêt ». Selon l'article 3, il existe quatre sortes de forêts : les forêts d'Etat, les forêts appartenant aux collectivités publiques, les forêts des fondations et les forêts privées. Ces dernières appartiennent à l'Etat mais sont exploitées par des particuliers qui payent un impôt à cet effet.
2. La loi no 4785 du 9 juillet 1945
41. L'article 1 de cette loi se lit comme suit :
« A la date de l'entrée en vigueur de la présente loi, toutes les forêts concernant des personnes réelles ou morales, des particuliers, des fondations et des villages, des municipalités, des administrations et des personnes morales de droit public sont nationalisées en vertu de la présente loi. Les forêts sont transférées à l'Etat sans qu'un acte ou une notification quelconques soient nécessaires. »
42. L'article 4 de cette loi prévoit des exceptions à la nationalisation, notamment en ce qui concerne les forêts contenant certaines sortes d'arbres plantés par les soins de particuliers.
43. L'article 7 de cette loi prévoit une indemnisation en cas de nationalisation.
3. La loi no 5653 du 24 mars 1950
44. La loi no 5653 redéfinit le domaine forestier. D'après l'article 1 § c de cette loi, le maquis n'est plus considéré comme de la forêt, à moins que les terrains couverts de maquis soient protégés ou produisent des récoltes, selon les conditions définies par cette loi.
45. Toujours selon l'article 1, à compter du 3 avril 1950, les domaines ayant perdu le caractère de forêt ne seront plus considérés comme telle.
46. Cette loi distingue trois sortes de domaines forestiers : les forêts d'Etat, les forêts appartenant à des personnes morales (telles les villages et les municipalités) et les forêts privées.
4. La loi no 5658 du 24 mars 1950
47. L'article 1 de la loi no 5658 prévoit la restitution des forêts nationalisées dans certaines conditions :
« Parmi les forêts nationalisées par la loi no 4785 du 9 juillet 1945, les forêts qui ne se trouvent pas à l'intérieur de forêts d'Etat et qui sont entourées de domaines agricoles tels que champs, vignobles, jardins, lieux tels que forêts privées, villes, bourgades, pâturages de villages, et les forêts appartenant à des villages, des personnes morales municipales ou des personnes réelles, et qui sont entourées de domaines non qualifiés de forêts d'après l'article 1 de la loi sur les forêts, à condition d'être entièrement séparées des forêts d'Etat, sont restituées sur demande à leurs propriétaires ou à leurs héritiers ».
5. La loi no 6831 du 31 août 1956
48. L'article 1 de cette loi définit la notion de « forêt » et ses exceptions.
49. Selon l'article 2 § B (tel que modifié le 5 juin 1986 par la loi no 3302):
« Les lieux ayant perdu intégralement leur caractère de forêt sur les plans scientifique et technique avant la date du 31 décembre 1981 sont exclus des limites de la forêt, d'une part s'il a été constaté qu'il y avait un intérêt à les utiliser à des fins agricoles diverses en tant que champs, vignobles, jardins, plantations d'arbres fruitiers, d'oliviers, de noisetiers ou de pistachiers (pistaches, pignons), ou à des fins d'élevage, et d'autre part s'il s'agit de secteurs d'une ville, d'une bourgade ou d'un village où l'habitation est concentrée.
Les lieux exclus des limites de la forêt sont mis au profit du Trésor public s'ils appartenaient déjà à l'Etat, ou au profit des établissements publics dotés de la personnalité juridique morale s'ils leur appartenaient déjà, ou au profit de leurs propriétaires si les zones en question étaient des forêts privées. Les rectifications et inscriptions requises sont définitivement réalisées au registre foncier lorsque la procédure [d'exclusion des forêts] devient définitive.
Aucun autre rétrécissement des zones forestières ne peut avoir lieu en dehors des lieux précisés. (...) ».
50. D'après l'article 4, il existe du point de vue de la propriété et de l'administration trois sortes de forêts : les forêts d'Etat (articles 7 à 44), les forêts appartenant aux personnes morales administratives (articles 45 à 49) et les forêts privées (articles 50 à 55).
51. Selon l'article 7 de cette loi, la nature d'un domaine – forêt d'Etat ou forêt privée – est définie par les commissions cadastrales. Par ailleurs, les articles 7 à 12 de la loi régissent les modalités de travail des commissions cadastrales.
52. Les forêts d'Etat sont sous la protection de l'Etat. Tout acte altérant la nature forestière des forêts d'Etat est interdit (articles 14 à 19 notamment) et constitue une infraction. Les articles 79 à 90 indiquent les procédures applicables à la poursuite des actes contraires à la loi. Des dispositions d'ordre pénal figurent dans les articles 91 à 114. Les peines prévues pour certaines infractions peuvent être réduites si l'auteur de l'acte constituant l'infraction est le propriétaire du domaine en question (voir, par exemple, l'article 91 § 6).
53. Les forêts privées sont soumises à l'inspection et au contrôle de l'Etat. Leurs propriétaires ont un droit d'exploitation limité. Par ailleurs, ils ont notamment le droit de construire, sur une surface ne dépassant pas 6 % de la surface totale du terrain (article 52 § 2), si la forêt privée concernée se situe dans une zone d'habitation (village, bourgade ou ville).
54. La loi no 6831 a été modifiée à plusieurs reprises, par les lois nos 1744 (1973), 2896 (1983), 3302 (1986), 3373 (1987), 3493 (1988), 4079 (1995), 114 (1995), 4570 (2000), 4999 (2003), 5177 (2004), 5192 (2004) et 5728 (2008).
D. La loi no 3402 du 21 juin 1987
55. D'après l'article 11 de la loi no 3402 relative au cadastre, intitulé « la publication des résultats des travaux cadastraux », le directeur du cadastre fait publier les constatations cadastrales, par voie d'affichage, à la direction du cadastre et au lieu de travail du maire du village (muhtar), pour une durée de trente jours. Les intéressés peuvent saisir le tribunal du cadastre dans ce délai de publicité s'ils ont des objections à formuler contre ces constatations. Le directeur du cadastre est tenu d'accomplir ces formalités de publicité au plus tard dans les trois mois qui suivent la fin des travaux de cadastre effectués par l'équipe cadastrale. La publicité effectuée en vertu de cette loi est présumée avoir été notifiée directement aux personnes physiques concernées et aux personnes morales de droit public et privé.
56. En outre, l'article 12 de la loi no 3402, intitulé « acquisition du caractère définitif des procès-verbaux de cadastre et prescription extinctive », prévoit que les limitations et constatations contenues dans les procès-verbaux de cadastre contre lesquels aucune action n'est intentée dans le délai de publicité de trente jours deviennent définitives à l'expiration de ce délai. Les inscriptions nécessaires sont effectuées au registre foncier au plus tard dans les trois mois qui suivent les dates auxquelles les procès-verbaux ou les jugements pertinents sont devenus définitifs.
Aucune opposition ou action en justice fondée sur des éléments de preuve antérieurs aux travaux de cadastre n'est possible après expiration d'un délai de dix ans à partir de la date à laquelle les procès-verbaux de cadastre ont acquis un caractère définitif.
Les anciennes inscriptions au registre foncier effectuées avant les travaux de cadastre perdent leur validité, de sorte qu'il n'est plus possible d'établir des actes sur la base de celles-ci devant la Direction générale des titres et du cadastre.
E. La jurisprudence nationale
57. Le 23 juin 1964, la Cour constitutionnelle annula les articles 3 et 4 de la loi no 4785 sur les forêts, en raison des contradictions existant avec l'article 38 de la constitution de l'époque, qui prenait la valeur réelle du bien comme base de l'indemnité d'expropriation. L'article 3 indiquait que la valeur d'une forêt nationalisée était estimée à partir de la déclaration d'impôt. Quant à l'article 4, il définissait les critères relatifs à l'achat des constructions présentes dans une forêt nationalisée. A la question de savoir si l'annulation des articles concernés allait créer un vide juridique en la matière, la Cour constitutionnelle répondit dans les termes suivants :
« (...) quand les dispositions litigieuses seront annulées, les dispositions générales de la loi sur l'expropriation seront appliquées à l'expropriation des forêts ».
58. Le 28 mars 1995, la Cour de cassation constata que le Trésor public était responsable de la bonne tenue des registres fonciers, en vertu de l'article 917 de l'ancien code civil. Dans son arrêt, elle énuméra les critères permettant d'engager la responsabilité du Trésor public : l'existence d'un dommage, l'existence d'un acte d'un fonctionnaire qui est contraire au droit, et l'existence d'un lien de causalité entre le dommage et l'acte. Elle précisa également que le dommage devait s'être réalisé de manière définitive et que la demande devait être introduite dans un délai d'un an à partir de la réalisation définitive du dommage et, en tout état de cause, dans un délai prescriptif général de dix ans.
59. Dans un arrêt du 26 avril 1999, la Cour de cassation répéta que le Trésor public était responsable de la bonne tenue des registres fonciers, en vertu de l'article 917 de l'ancien code civil. En l'occurrence, l'intéressé n'avait pas pu faire appliquer certaines mesures provisoires au bien immobilier de son débiteur parce que les registres fonciers n'avaient pas été tenus selon les règles.
60. Le 7 mai 2002, l'Assemblée générale des chambres réunies du Conseil d'Etat (Danistay Dava Daireleri Genel Kurulu) constata que la compétence revenait au juge judiciaire en cas d'annulation d'un titre de propriété par le tribunal cadastral au motif que le terrain litigieux avait fait partie du domaine forestier (par la suite, ce domaine avait été exclu du domaine forestier public parce qu'il avait perdu le caractère de forêt). Dans cette affaire, les juges administratifs avaient rejeté la demande d'indemnisation en se fondant sur le jugement du tribunal cadastral ayant annulé le titre de propriété de l'intéressé. Ils avaient estimé que ce jugement était conforme au droit.
61. Dans son arrêt du 7 mai 2002, la première chambre de la Cour de cassation cassa le jugement du tribunal de fond qui avait refusé la demande de l'intéressé et constata que la responsabilité objective de l'Etat devait être engagée en raison des actes des fonctionnaires de la commission cadastrale, qui avaient conclu par erreur que le terrain litigieux ne faisait pas partie du domaine forestier public. En effet, en raison de cet acte aucune mention n'avait été apposée sur le registre foncier quant à la nature forestière du terrain, lequel avait été vendu à des tiers qui s'étaient fiés aux registres. En l'occurrence, le terrain litigieux avait été enregistré au nom des tiers à la suite des conclusions de la commission cadastrale, en 1959, et pour la première fois un acte de propriété avait été établi à leur nom. Le demandeur avait acquis le terrain en 1994 sur la base des renseignements figurant dans le registre foncier, lequel ne faisait aucune mention de la nature forestière du terrain. En 1977-1982, la commission cadastrale mena de nouveaux travaux et conclut que le terrain litigieux ne faisait plus partie du domaine forestier car celui-ci avait perdu les caractéristiques de la forêt. Elle décida de l'exclure du domaine forestier. Cette mention fut portée au registre foncier en 1995.
62. Le 30 octobre 2006, la troisième chambre de la Cour de cassation approuva le jugement du tribunal d'instance du 12 juin 2006 selon lequel le juge administratif était compétent pour les litiges concernant les demandes d'indemnisation liées à l'enregistrement du terrain suite aux travaux de la commission cadastrale. En l'occurrence, le terrain avait été acquis par l'intéressé en 1953. Puis il avait été inscrit à son nom à la suite des travaux de la commission cadastrale. Plus tard, le titre de propriété de l'intéressé avait été annulé par le tribunal au motif qu'il faisait partie du domaine forestier. Le tribunal avait rejeté la demande dans les termes suivants :
« Le demandeur réclame une indemnité en se fondant sur les deux actes administratifs que sont l'émission du titre de propriété et l'invalidation de celui-ci par la délimitation forestière. Le demandeur estime par ailleurs que l'administration a commis une faute dans la mesure où lui-même, titulaire du titre de propriété, ne s'est pas vu notifier le résultat de la délimitation forestière consécutive aux travaux effectués. Une demande d'indemnisation d'un dommage causé par un acte administratif ne peut être effectuée que devant le tribunal administratif, par un recours de plein droit ».
Le 30 janvier 2008, à la demande de Me M. Ö., représentant du demandeur dans l'affaire susmentionnée (également représentant du requérant dans la présente affaire), formulée le 5 décembre 2007, le premier conseil de la présidence de la Cour de cassation (Yargitay Birinci Baskanlik Kurulu) répondit qu'il n'existait pas de contradiction entre les deux arrêts précédents et qu'en conséquence il n'était pas nécessaire de recourir à la procédure d'harmonisation de la jurisprudence.
63. Par un arrêt du 19 avril 2006, l'Assemblée générale de la Cour de cassation approuva le jugement du tribunal de fond qui avait constaté la responsabilité objective de l'Etat en raison d'actes des fonctionnaires de la Direction des registres fonciers. En l'occurrence, en 1976 un tiers avait vendu un terrain au demandeur en utilisant une fausse décision de justice, alors qu'en 1954 le terrain en question avait été classé par la commission cadastrale comme pâturage (mera) et faisait par conséquent partie du domaine public. Le tribunal du fond avait partiellement accueilli la demande et avait accordé une indemnité pour la maison que le demandeur avait bâtie et les arbres qu'il avait plantés sur le terrain litigieux. La Cour de cassation nota que la possibilité pour le demandeur de se retourner contre le tiers n'exonérait pas l'administration de sa responsabilité objective. Même en l'absence de faute, l'Etat était responsable à partir du moment où trois conditions se trouvaient réunies : l'existence d'un acte entaché d'erreur, l'existence d'un dommage et l'existence d'un lien de causalité entre l'acte entaché d'erreur et le dommage. Par ailleurs, la Cour de cassation fit référence aux dispositions du code civil protégeant la bonne foi d'une personne qui s'est fiée au registre foncier.
64. Le 26 juin 2006, le tribunal administratif de Bursa rejeta une demande d'indemnisation pour le dommage que le demandeur alléguait avoir subi du fait de l'annulation de son titre de propriété parce que son terrain faisait partie du domaine forestier. Le demandeur s'était adressé au tribunal administratif après avoir saisi le juge judiciaire, lequel s'était déclaré incompétent ratione materiae. Selon le tribunal administratif, la demande était tardive car le demandeur aurait dû introduire sa demande dans les soixante jours à partir de la date où le jugement annulant son titre de propriété était devenu définitif.
65. D'après le document versé au dossier par le Gouvernement, Me M. Ö. (représentant du requérant dans l'affaire présente) s'adressa au nom de l'un de ses clients au tribunal administratif de Bursa pour demander l'engagement de la responsabilité objective de l'Etat. Dans cette affaire, le titre de propriété de son client avait été annulé en raison du fait que son terrain faisait partie du domaine forestier public. Dans son recours, il expliqua que sa demande avait été rejetée par le tribunal d'instance de Çanakkale qui s'était déclaré incompétent ratione materiae. Après avoir invoqué les problèmes de compétence entre les différentes juridictions, Me M. Ö. demanda au tribunal administratif de transférer l'affaire devant le tribunal de conflits pour éviter un nouveau jugement d'incompétence. Il sollicita également d'envoyer l'affaire devant la Cour constitutionnelle, en raison des conflits, selon lui, entre les dispositions en matière de droit des propriétés et sur les forêts.
EN DROIT
66. Le requérant soutient que la qualification de domaine forestier public donnée à son terrain, sans versement d'une quelconque indemnité, constitue une atteinte disproportionnée à son droit au respect de ses biens au sens de l'article 1 du Protocole no 1. Il se plaint également de l'article 6 § 1 de la Convention.
I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L'ARTICLE 1 DU PROTOCOLE No 1
A. Sur la recevabilité
67. Le Gouvernement invite tout d'abord la Cour à déclarer ce grief irrecevable au motif que l'affaire en cause était encore pendante devant les instances nationales à la date de son introduction.
68. La Cour constate que la procédure interne concernant la délimitation du terrain s'est achevée le 2 juillet 2004 par l'arrêt de la Cour de cassation. Elle rappelle qu'elle tolère que le dernier échelon des recours internes soit atteint après le dépôt de la requête, mais avant qu'elle ne soit appelée à se prononcer sur la recevabilité (voir, mutatis mutandis, Ringeisen c. Autriche, arrêt du 16 juillet 1971, série A no 13, p. 38, § 91, et E.K. c. Turquie (déc.), no 28496/95, 28 novembre 2000). En conséquence, elle rejette cette branche de l'exception.
69. Ensuite, le Gouvernement demande à la Cour de déclarer la requête irrecevable dans la mesure où le requérant n'a formulé aucune objection contre la décision de la commission cadastrale rendue publique le 19 novembre 1990.
70. Le requérant s'oppose à la thèse du Gouvernement. Il soutient qu'il a acquis le terrain litigieux de bonne foi, en se fiant au registre foncier.
71. La Cour constate que le requérant n'avait pas, matériellement, la possibilité de s'opposer aux conclusions de la commission du cadastre du 19 novembre 1990, car il n'était pas encore propriétaire. Par ailleurs, elle note qu'aucun élément objectif du dossier ne permet d'établir que, lors de l'achat du terrain litigieux en 1993, il y avait une inscription sur le registre foncier portant sur sa qualification comme forestier ni que le requérant avait connaissance de cette qualification. Enfin, la Cour rappelle que les juridictions internes n'ont pas déclaré irrecevable la demande du requérant en raison d'un problème de non-respect du délai. Elles ont procédé à un examen du fond de l'affaire et ont rejeté la demande. Dès lors, cette branche de l'exception doit également être rejetée.
72. Le Gouvernement soutient enfin que le requérant aurait pu s'adresser à l'administration pour demander une indemnité et, en cas de refus explicite ou implicite, intenter une action pour le dommage subi par l'annulation de son titre de propriété sur le fondement des dispositions pertinentes de la Constitution – selon lesquelles tous les actes et décisions de l'administration peuvent faire l'objet d'un recours judiciaire – ou sur celui des dispositions pertinentes du code de procédure administrative. A cet égard, il se réfère à la jurisprudence nationale rappelée plus haut. Il rappelle également que Me M. Ö. lui-même (représentant du requérant dans la présente affaire) s'est adressé au tribunal administratif de Bursa, le 11 décembre 2006, pour faire valoir la responsabilité objective de l'Etat en la matière, et que la procédure est toujours pendante (paragraphe 65 ci-dessus).
73. Le requérant conteste ces arguments. Il soutient qu'il n'existe au niveau administratif aucune voie de recours interne qu'il faut épuiser pour se plaindre d'un jugement définitif quant à la qualification d'un terrain comme domaine forestier public. En ce qui concerne la jurisprudence invoquée par le Gouvernement, il estime qu'il a y eu des cas isolés mais qu'en principe une telle demande n'a aucune chance réelle de succès. A l'appui de sa thèse, il renvoie à son tour à des jugements concernant la pratique interne en la matière.
74. Pour ce qui est de la possibilité de demander une indemnité en vertu du principe selon lequel tous les actes et décisions de l'administration peuvent faire l'objet d'un recours judiciaire, la Cour rappelle qu'elle a déjà rejeté une exception semblable dans l'affaire Dogrusöz et Aslan c. Turquie (no 1262/02, §§ 22-23, 30 mai 2006) au motif que ces recours ne concernent que le cas de l'annulation illégale de l'inscription d'un titre sur le registre foncier. Or, en l'espèce, le tribunal cadastral de Çanakkale a rejeté la demande du requérant quant à la délimitation, conformément à la législation relative au domaine forestier selon laquelle les terrains faisant partie de ce domaine ne peuvent appartenir à un particulier (voir, mutatis mutandis, Mehmet Ali Miçoogullari c. Turquie, no 75606/01, § 17, 10 mai 2007).
75. En ce qui concerne le fait d'exiger du requérant qu'il fasse une nouvelle demande afin d'obtenir une indemnité sur le fondement de la responsabilité objective de l'Etat, après le rejet de sa demande initiale concernant l'annulation de la délimitation de son terrain en tant que domaine forestier public, comme dans les exemples mentionnés plus haut, la Cour rappelle que l'obligation découlant de l'article 35 § 1 se limite à celle de faire un usage normal des recours vraisemblablement efficaces, suffisants et accessibles (Sofri et autres c. Italie (déc.), no 37235/97, CEDH 2003-VIII). En particulier, la Convention ne prescrit l'épuisement que des recours à la fois relatifs aux violations incriminées, disponibles et adéquats. Ces recours doivent exister à un degré suffisant de certitude non seulement en théorie mais aussi en pratique, sans quoi leur manquent l'effectivité et l'accessibilité voulues (Akdivar et autres c. Turquie, arrêt du 16 septembre 1996, Recueil des arrêts et décisions 1996-IV, p. 1210, § 66).
76. En l'occurrence, la Cour note tout d'abord que, dans les jugements invoqués par le Gouvernement, les tribunaux internes ont considéré que les inscriptions dans les registres fonciers qui avaient causé un dommage aux titulaires de bonne foi de titres de propriété avaient été faites à la suite d'une « erreur », même si celle-ci n'était pas le résultat d'une faute de l'agent de l'Etat ; or en l'occurrence rien ne démontre que le titre de propriété du requérant ou ceux des précédents propriétaires depuis 1953 ont été établis à la suite d'une erreur. Il n'est pas contesté par les parties qu'en 1953 le Trésor public a vendu le terrain litigieux comme champ agricole à un particulier et que le requérant a été le cinquième propriétaire à l'acquérir, ce qu'il a fait en se fiant au registre foncier qui ne mentionnait nullement sa qualification de domaine forestier public. Les tribunaux internes ont rejeté la demande du requérant quant à la délimitation sur la base des éléments recueillis pendant la procédure, non pas en raison d'un acte entaché d'erreur commis par des agents de l'administration, qui en 1953 ont qualifié le terrain de champ agricole, mais compte tenu des dispositions législatives applicables en la matière.
Ensuite, à la lumière de la jurisprudence invoquée par les deux parties, la Cour estime que le Gouvernement n'a nullement montré dans quelle mesure un tel recours pourrait être efficace, suffisant et accessible, eu égard aux dispositions internes concernant la qualification de domaine forestier public donnée à un terrain appartenant à un particulier.
Enfin, sans spéculer sur l'issue des procédures devant les juridictions turques suprêmes en la matière, la Cour estime qu'en l'occurrence il ne serait pas opportun de demander au requérant, qui a déjà attendu de 1996 à 2004 une décision concernant la nature du terrain en question, d'engager une nouvelle procédure afin d'obtenir une indemnité (voir, mutatis mutandis, Guillemin c. France, arrêt du 21 février 1997, Recueil 1997-I, § 50).
77. En conclusion, la Cour constate que ce grief n'est pas manifestement mal fondé au sens de l'article 35 § 3 de la Convention. Elle relève par ailleurs que celui-ci ne se heurte à aucun autre motif d'irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.
B. Sur le fond
78. Le requérant soutient que la qualification de domaine forestier public donnée à son terrain et le jugement des tribunaux internes rejetant son recours contre cette qualification, sans versement d'une quelconque indemnité, constituent une atteinte disproportionnée à son droit au respect de ses biens au sens de l'article 1 du Protocole no 1, lequel est ainsi libellé :
« Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.
Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les États de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. »
1. Les arguments des parties
a) Le requérant
79. Selon le requérant, les tribunaux nationaux ont rejeté sa demande d'annulation de la qualification de domaine forestier public donnée à son terrain, alors qu'il était clair qu'il s'agissait d'un terrain agricole. Le terrain avait cette nature à la fois en 1953, lors de la première vente par le Trésor public, et en 1993 lorsqu'il l'a lui-même acheté. Juridiquement et techniquement, le terrain ne devrait donc pouvoir être qualifié de domaine forestier public. Cependant, puisqu'il est ainsi qualifié, l'Etat doit l'indemniser en poursuivant la procédure d'expropriation, dans la mesure où la restriction en l'occurrence équivaut à une privation de propriété. A cet égard, il conteste la thèse du Gouvernement selon laquelle la restriction litigieuse constitue une simple limitation de l'utilisation de son droit de propriété, comme dans l'affaire Ansay c. Turquie (déc.), no 49908/99, 2 mars 2006. Il rappelle qu'après une telle délimitation, le fait d'utiliser son terrain lui est devenu impossible et peut lui valoir une condamnation pénale. Aux yeux du requérant, la délimitation du terrain litigieux, sans versement d'aucune compensation, constitue une expropriation de facto et implique une atteinte disproportionnée à son droit au respect de ses biens.
b) Le Gouvernement
80. Se référant à la jurisprudence de la Cour en la matière (Dagalas et autres c. Turquie (déc.), no 51326/99, 29 septembre 2005 ; Özden c. Turquie (déc.), no 11841/02, 3 mai 2007 ; Gündüz c. Turquie (déc.), no 50253/07, 18 octobre 2007 ; et Pekinel c. Turquie, no 9939/02, 18 mars 2008), le Gouvernement soutient que le requérant n'avait ni un « bien actuel », ni une « espérance légitime » de voir se concrétiser une quelconque créance actuelle et exigible au sens de l'article 1 du Protocole no 1, car lorsqu'il a acheté le terrain en 1993 il savait ou aurait dû savoir que celui-ci avait été qualifié de domaine forestier public en 1990. Par ailleurs, renvoyant à l'affaire Ansay c. Turquie, le Gouvernement soutient que la restriction apportée au droit de propriété du requérant poursuivait un but légitime et était proportionnée.
2. L'appréciation de la Cour
81. La Cour rappelle que, selon sa jurisprudence, l'article 1 du Protocole no 1, qui garantit en substance le droit de propriété, contient trois normes distinctes (voir, notamment, James et autres c. Royaume-Uni, arrêt du 21 février 1986, série A no 98, pp. 29-30, § 37) : la première, qui s'exprime dans la première phrase du premier alinéa et revêt un caractère général, énonce le principe du respect de la propriété ; la deuxième, figurant dans la seconde phrase du même alinéa, vise la privation de propriété et la soumet à certaines conditions ; quant à la troisième, consignée dans le second alinéa, elle reconnaît aux Etats contractants le pouvoir, entre autres, de réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général. Les deuxième et troisième normes, qui ont trait à des exemples particuliers d'atteintes au droit de propriété, doivent s'interpréter à la lumière du principe consacré par la première (Bruncrona c. Finlande, no 41673/98, §§ 65-69, 16 novembre 2004, et Broniowski c. Pologne [GC], no 31443/96, § 134, CEDH 2004-V).
82. En ce qui concerne l'existence d'un bien au sens de l'article 1 du Protocole 1, la Cour ne saurait suivre la thèse du Gouvernement. Elle note que le cas d'espèce se distingue des affaires invoquées par le Gouvernement, dans la mesure où il n'a été démontré par aucun élément objectif que le requérant avait eu connaissance de la délimitation lors de son achat du terrain, les registres fonciers n'ayant contenu aucune annotation. En tout état de cause, on ne saurait contester que, selon le droit et la pratique internes, le détenteur d'un titre de propriété valable a le droit de protester contre les restrictions apportées à la suite des travaux des commissions cadastrales, ce pendant une période de dix ans à compter de leur notification. En d'autres termes, le détenteur d'un tel titre de propriété peut parfaitement espérer avoir un bien sans restriction jusqu'au moment où la délimitation devient définitive en vertu d'un jugement définitif en la matière. Le requérant a donc « un bien » au sens de l'article 1 du Protocole no 1 (voir, parmi d'autres, Kopecký c. Slovaquie [GC], no 44912/98, § 35, CEDH 2004-IX).
83. Quant à l'existence de l'ingérence, la Cour constate que les parties s'accordent à admettre qu'il y a eu ingérence dans le droit au respect des biens du requérant en raison de la qualification de domaine forestier public donnée au terrain litigieux. Toutefois, elles divergent quant aux effets de l'ingérence.
84. En l'occurrence, le requérant qualifie la délimitation d'expropriation de facto, alors que le Gouvernement soutient que la situation litigieuse relève de la réglementation de l'usage des biens.
85. La Cour relève que les effets de la restriction litigieuse dénoncés par le requérant découlent tous d'une importante réduction de la disponibilité du bien en cause (paragraphe 90 ci-dessous), qui doit être examinée sous l'angle de la première phrase du premier alinéa de l'article 1 du Protocole no 1.
86. La Cour relève, tout d'abord, qu'il n'est nullement prouvé que le requérant n'était pas de bonne foi au moment de l'acquisition du terrain en question et elle souligne qu'il détenait un titre de propriété valable.
87. La Cour constate, ensuite, que les autorités compétentes ont, par une décision judiciaire, qualifié le terrain litigieux de domaine forestier public (paragraphes 10 et 22 ci-dessus). Malgré l'opposition exercée par le requérant en vertu du droit interne quant à la nature du terrain, les tribunaux internes ont finalement validé la délimitation en question, en application des dispositions constitutionnelles, en se fondant sur les rapports d'expertise selon lesquels le terrain faisait partie du domaine forestier. Eu égard aux motivations avancées par les juridictions nationales, la Cour estime que le but de la privation imposée au requérant, à savoir la protection de la nature et des forêts, entre dans le cadre de l'intérêt général au sens de la seconde phrase du premier alinéa de l'article 1 du Protocole no 1 (Lazaridi c. Grèce, no 31282/04, § 34, 13 juillet 2006). Elle rappelle à cet égard que si aucune disposition de la Convention n'est spécialement destinée à assurer une protection générale de l'environnement en tant que tel (Kyrtatos c. Grèce, no 41666/98, § 52, CEDH 2003-VI), la société d'aujourd'hui se soucie sans cesse davantage de le préserver (Fredin c. Suède (no 1), arrêt du 18 février 1991, série A no 192, § 48). Elle note qu'elle a traité maintes fois des questions liées à la protection de l'environnement et souligné l'importance de la matière (voir, par exemple, Taskin et autres c. Turquie, no 46117/99, CEDH 2004-X ; Moreno Gómez c. Espagne, no 4143/02, CEDH 2004-X ; Fadeïeva c. Russie, no 55723/00, CEDH 2005-IV ; Giacomelli c. Italie, no 59909/00, CEDH 2006-...). La protection de la nature et des forêts, et plus généralement de l'environnement, constitue une valeur dont la défense suscite dans l'opinion publique, et par conséquent auprès des pouvoirs publics, un intérêt constant et soutenu. Des impératifs économiques et même certains droits fondamentaux, comme le droit de propriété, ne devraient pas se voir accorder la primauté face à des considérations relatives à la protection de l'environnement, en particulier lorsque l'Etat a légiféré en la matière (Hamer c. Belgique, no 21861/03, § 79, CEDH 2007-... (extraits)).
88. Avant de se prononcer sur la question de savoir si la restriction litigieuse a respecté le juste équilibre voulu en la matière, la Cour tient à préciser qu'elle ne saurait suivre le Gouvernement lorsqu'il soutient que la décision Ansay c. Turquie (no 49908/99, 2 mars 2006) est pertinente pour l'examen de la présente affaire. Outre que, dans l'affaire Ansay, la Cour ne disposait pas de suffisamment d'éléments de fait et de droit quant aux effets restrictifs réels de la délimitation sur le droit des requérants de jouir de leur bien, la question principale qu'elle devait trancher était de savoir si l'annulation du permis de construire des intéressés leur avait causé un préjudice de nature à rendre cette mesure disproportionnée au but légitime poursuivi. La Cour, à juste titre, a examiné cette question sur le terrain de la notion de « réglementation de l'usage des biens » au sens du deuxième alinéa de l'article 1 du Protocole no 1 alors que, en l'espèce, il s'agit d'une mesure qui constituait la phase initiale d'une privation de propriété.
89. Dans la présente affaire, le requérant a acquis de bonne foi en 1993 le terrain litigieux qui était, à ce moment, qualifié, sans controverse, de terrain agricole (paragraphes 8 et 9 ci-dessus) et qui était exempt de toute inscription restrictive sur le registre foncier lequel seul fait foi en droit turc (paragraphe 38 ci-dessus). L'acquisition du terrain par le requérant n'était donc entachée d'aucune irrégularité susceptible de lui être opposée ; s'il n'en était pas ainsi, la Direction générale des titres et du cadastre ne lui aurait sûrement pas délivré le titre de propriété établi en bonne et due forme (paragraphe 9), titre qu'il fait maintenant valoir devant la Cour.
90. A cet égard, la Cour n'a pas à s'attarder sur l'argument du Gouvernement faisant valoir qu'à la date d'acquisition du terrain, le requérant aurait dû être au courant de la requalification de celui-ci (paragraphe 80 ci-dessus), étant entendu que nul élément vérifiable ne vient appuyer cette assertion. En revanche, la Cour observe qu'à l'heure actuelle, au mépris du titre de propriété dont il demeure titulaire, le requérant, qui avait acheté un champ agricole, ne peut le cultiver ni en récolter les fruits ni contracter aucune transaction sur ce terrain. En bref, il n'a aucune possibilité réelle d'en jouir.
91. Partant, tout en soulignant que sa décision se limite aux faits de l'espèce et ne doit pas s'interpréter comme une conclusion de principe signifiant qu'une classification de domaine forestier équivaut, indépendamment de toutes les circonstances entourant l'affaire, à une atteinte au droit au respect des biens au sens de la première phrase de l'article 1 du Protocole no 1, force est de considérer que la qualification de domaine forestier donnée au terrain litigieux a eu, en l'espèce, pour effet de vider de tout contenu le droit de propriété du requérant, droit qui avait été régulièrement acquis dans les conditions décrites plus haut (paragraphe 9 ci-dessus). L'argument selon lequel le requérant aurait été en mesure de pouvoir vendre ce terrain à un tiers jusqu'à la mesure préventive imposée le 28 septembre 2007 (paragraphe 33-34 ci-dessus), n'affecte en rien cette constatation dans la mesure où, d'une part, cette possibilité de vente est purement théorique et, d'autre part, une procédure visant l'annulation du titre de propriété et son transfert en faveur de la direction des forêts a été engagée.
92. Il reste à déterminer si la mesure litigieuse respecte le juste équilibre voulu et, notamment, si elle ne fait pas peser sur le requérant une charge disproportionnée. A cet égard, il y a lieu de prendre en considération les modalités d'indemnisation prévues par la législation interne. A ce sujet, la Cour vient de constater qu'il n'existait pas de recours interne efficace en la matière (paragraphe 74 ci-dessus). Les circonstances de la cause, notamment le caractère définitif de la délimitation, l'absence de tout recours interne efficace susceptible de remédier à la situation litigieuse, l'entrave à la pleine jouissance du droit de propriété et l'absence d'indemnisation, amènent la Cour à considérer que le requérant a eu à supporter une charge spéciale et exorbitante qui a rompu le juste équilibre devant régner entre, d'une part, les exigences de l'intérêt général et, d'autre part, la sauvegarde du droit au respect des biens (voir, mutatis mutandis, Terazzi S.r.l., précité, § 91). La Cour note que le Gouvernement n'a invoqué aucune circonstance exceptionnelle pour justifier l'absence totale d'indemnisation.
93. Dès lors, il y a eu violation de l'article 1 du Protocole no 1.
II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L'ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION
94. Le requérant se plaint du défaut d'équité et de la partialité des juridictions nationales, lesquelles auraient statué sur des éléments de preuve tronqués. Il invoque à cet égard l'article 6 de la Convention, dont le passage pertinent est ainsi libellé :
« 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »
95. Le Gouvernement invite la Cour à déclarer ce grief irrecevable pour défaut de fondement.
96. Le requérant soutient que les tribunaux internes se sont basés sur des preuves tronquées pour rejeter sa demande concernant la délimitation du terrain litigieux. Selon lui, les tribunaux auraient dû examiner les documents anciens auxquels il affirme ne pas avoir accès.
97. Compte tenu de la formulation du grief, la Cour constate que le requérant remet en cause essentiellement la manière dont les juridictions nationales ont apprécié les preuves. A cet égard, elle ne relève aucun élément arbitraire permettant d'estimer que lesdites juridictions se sont fondées sur des preuves tronquées pour décider du bien-fondé de la demande du requérant. Elle observe que le tribunal de grande instance de Çanakkale a rendu son jugement à la lumière des différents rapports d'expertise ainsi que d'autres éléments recueillis de façon objective (paragraphe 22 ci-dessus). La Cour note en outre que la Cour de cassation a examiné le grief du requérant à ce sujet et a constaté que le tribunal du fond avait rendu son jugement sur la base des dispositions pertinentes ainsi que d'éléments objectifs, tels le dénivelé propre au terrain litigieux, sans avoir besoin de se référer aux documents anciens (paragraphe 24 ci-dessus).
98. En tout état de cause, dans la mesure où le requérant conteste en substance la solution adoptée par les tribunaux nationaux, la Cour rappelle qu'il ne lui appartient pas d'apprécier elle-même les éléments de fait ayant conduit une juridiction à adopter telle décision plutôt que telle autre, et que sinon elle s'érigerait en juge de troisième ou quatrième instance (Kemmache c. France (no 3), arrêt du 24 novembre 1994, série A no 296-C, § 44).
99. Il s'ensuit que le grief tiré de l'absence d'équité est manifestement mal fondé et doit être rejeté en application de l'article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.
III. SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
100. Aux termes de l'article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu'il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d'effacer qu'imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s'il y a lieu, une satisfaction équitable. »
101. Pour le préjudice matériel, le requérant réclame 1 761 230 euros (EUR), soit environ 83 EUR/m², pour une superficie totale de 21 200 m². A cet égard, il se fonde à titre comparatif sur la valeur des terrains avoisinants. Il porte à la connaissance de la Cour deux exemples de promesses d'achat : l'une concerne un terrain de 13 762,44 m², pour une somme de 4 217 500 EUR ; l'autre concerne un terrain 12 026,56 m², pour un montant de 2 078 050 EUR. Sans se référer à un document précis quant à la superficie du terrain frappé de restrictions, il demande à être indemnisé pour la totalité du terrain. Il soutient que, même si seule une partie du terrain (environ 18 000 m²) est affectée par la mesure litigieuse, le restant du terrain perd également son utilité. Par ailleurs, il sollicite pour le manque à gagner un montant de 352 246 EUR.
102. Au titre du dommage moral, il réclame 10 000 EUR.
103. Le requérant sollicite 10 000 EUR pour les honoraires de son représentant, 3 000 EUR pour les frais et dépens et 5 000 EUR pour les frais de participation à l'audience qui a eu lieu à Strasbourg.
104. Le Gouvernement invite la Cour à rejeter les demandes d'indemnisation, qu'il juge excessives et dépourvues de fondement. Il estime par ailleurs que la demande du requérant concernant la totalité de la superficie du terrain est inacceptable dans la mesure où la restriction litigieuse est partielle. Il ne se réfère pas non plus à un document particulier quant à la superficie affectée du terrain.
105. Pour ce qui est du remboursement des frais et dépens, le Gouvernement conteste ces prétentions, soutenant qu'elles ne sont aucunement étayées.
106. Dans les circonstances de l'espèce, la Cour estime que la question de l'application de l'article 41 ne se trouve pas en état, de sorte qu'il convient de la réserver en tenant compte de l'éventualité d'un accord entre l'Etat défendeur et les requérants.
PAR CES MOTIFS, LA COUR,
1. Déclare, à l'unanimité, la requête recevable quant au grief du requérant tiré d'une atteinte au droit au respect de ses biens, et irrecevable pour le surplus ;
2. Dit, par cinq voix contre deux, qu'il y a eu violation de l'article 1 du Protocole no 1 ;
3. Dit, par cinq voix contre deux, que la question de l'application de l'article 41 de la Convention ne se trouve pas en état ; en conséquence,
a) la réserve ;
b) invite le Gouvernement et le requérant à lui adresser par écrit, dans un délai de six mois à compter de la date de notification du présent arrêt, leurs observations sur cette question, et notamment à lui donner connaissance de tout accord auquel ils pourraient aboutir ;
c) réserve la procédure ultérieure et délègue au président de la chambre le soin de la fixer au besoin.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 15 juillet 2008 en application de l'article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Sally Dollé Françoise Tulkens
Greffière Présidente
Au présent arrêt se trouve joint, conformément aux articles 45 § 2 de la Convention et 74 § 2 du règlement, l'exposé de l'opinion dissidente des juges MM. Cabral Barreto et Türmen.
F.T.
S.D.
OPINION DISSIDENTE DES JUGES
CABRAL BARRETO ET TÜRMEN
A notre grand regret, nous ne sommes pas en mesure de suivre l'approche de la majorité ; pour nous, il n'y a pas eu violation de l'article 1 du Protocole no 1 pour les raisons suivantes.
1. Tout d'abord, le requérant a acquis le terrain en cause en juillet 1993.
Il est vrai que, à ce moment-là, aucune mention n'avait été portée au registre foncier sur l'intégration de la parcelle dans le domaine forestier public ; toutefois, le 20 août 1990, la commission cadastrale avait procédé à la délimitation du domaine forestier public, avec l'intégration du terrain dans ce domaine, décision qui a été rendue publique.
Les paragraphes 71, 86 et 89 de l'arrêt faisant état de la « bonne foi » du requérant doivent être lus avec une certaine réserve : le requérant avait la possibilité, s'il avait eu la diligence nécessaire avant d'en faire l'acquisition, de connaître la situation du terrain en cause, notamment quant au point de savoir s'il appartenait ou non au domaine forestier.
2. Sur l'essentiel, il faut savoir qu'en droit turc, il y a diverses catégories de forêts.
D'après l'article 3 de la loi nº 3116 du 8 février 1937, il existait quatre sortes de forêts : les forêts d'Etat, les forêts appartenant aux collectivités publiques, les forêts des fondations et les forêts privées.
Aujourd'hui, l'article 4 de la loi nº 6831 du 31 août 1956 prévoit trois sortes de forêts : les forêts d'Etat, les forêts appartenant aux personnes morales administratives et les forêts privées.
Les forêts privées sont soumises à l'inspection et au contrôle de l'Etat ; leurs propriétaires ont un droit limité d'exploitation (paragraphe 53 de l'arrêt).
D'après l'article 169 de la Constitution, seule la propriété des forêts d'Etat est inaliénable.
La majorité ne valorise pas suffisamment le fait que les forêts appartenant à des personnes privées peuvent être librement transférées à des tiers (paragraphe 91 de l'arrêt).
Il suffit de faire attention au fait que, dans la procédure relative à l'annulation du titre de propriété du requérant et à l'inscription du terrain sur le registre foncier au nom du Trésor public, le ministère des Forêts a demandé des mesures provisoires afin d'empêcher le transfert du terrain à des tiers (paragraphe 33 de l'arrêt).
Bref, nous arrivons à la conclusion qu'au moment de l'adoption de l'arrêt, le requérant était toujours propriétaire d'un terrain forestier.
Ce terrain était certainement soumis à des limitations, notamment en ce qui concerne la possibilité d'y construire ou de l'exploiter en tant que terrain agricole.
Cependant, il était loisible au requérant non seulement de le vendre à des tiers mais aussi de l'exploiter en tant que terrain forestier, et ce conformément à la legis artis, en procédant par exemple à son boisement ou déboisement d'une façon adéquate.
3. Dans les circonstances de l'espèce, nous n'arrivons pas à comprendre que la majorité se soit éloignée d'une jurisprudence bien connue qu'elle a elle-même déjà suivie dans d'autres affaires, et qui consiste à dire que les limitations au droit de propriété peuvent se révéler justifiées et proportionnées quand l'intérêt public est en cause.
3.1. La majorité examine le grief du requérant sous l'angle de la première phrase de l'article 1 du Protocole no 1 qui énonce le principe du respect de la propriété.
Il nous semble que le droit de propriété du requérant a été respecté en l'espèce, le requérant étant toujours titulaire de son droit de propriété.
Il est vrai que le droit de propriété a subi des restrictions ; mais il est vrai aussi qu'il n'a pas été vidé de toute substance comme la majorité le laisse en quelque sorte sous-entendre quand elle indique, ce qui est à notre avis erroné, que le requérant « n'a aucune possibilité réelle d'en jouir » (paragraphe 90 de l'arrêt).
3.2. La jouissance en cause ne diffère en rien de la jouissance qui avait été examinée dans l'affaire Ansay c. Turquie ((déc.), no 49908/99, 2 mars 2006).
Dans l'affaire Ansay, il y avait aussi un achat d'un terrain de bonne foi, terrain pour lequel un permis de construire avait été accordé.
Toutefois, ce permis avait été annulé au motif que le terrain se situait sur un domaine forestier.
Dans cette affaire, les requérants alléguaient que la décision de classer le terrain dans la « forêt domaniale », avec toutes les limitations de l'usage qu'une telle qualification entraîne, portait atteinte à leur droit de propriété.
La Cour a constaté dans cette affaire qu'il n'y avait eu en l'espèce ni expropriation formelle ni expropriation de fait ; de plus, « le fait qu'un terrain soit qualifié de « forestier » n'emporte pas privation de propriété, car même après cette qualification, une parcelle peut demeurer privée, en l'absence de procédure d'annulation du titre de propriété ».
Dans l'affaire Ansay, la Cour a précisé que les limitations découlant de la nature forestière du terrain constituaient une ingérence dans la jouissance des droits que les requérants tiraient de leur qualité de propriétaires et que, dès lors, le second alinéa de l'article 1 du Protocole no 1 trouvait à s'appliquer.
La Cour a trouvé cette ingérence justifiée eu égard aux préoccupations environnementales ; or la mesure litigieuse ne pouvait être considérée comme causant aux requérants un préjudice de nature à rendre la mesure disproportionnée au but légitime visé.
3.3. Une approche identique a été suivie par notre section dans sa décision adoptée le 26 juin 2007 dans l'affaire Longobardi et autres c. Italie (no 7670/03), examinée aussi sur l'angle du second alinéa de l'article 1 du Protocole no 1.
Un terrain était classé comme constructible ; mais à un moment donné le ministère du Patrimoine et de l'Environnement le frappa d'une interdiction absolue de construire en raison de l'intérêt archéologique de la zone dans laquelle ce terrain se trouvait et tout cela sans indemnisation ; il fallait en l'espèce sauvegarder la visibilité du mausolée de Santa Elena.
A cet égard, la Cour a observé qu'un juste équilibre avait été ménagé entre les exigences de l'intérêt général et les impératifs de sauvegarde des droits fondamentaux de l'individu, et ce malgré l'absence d'indemnisation.
Dans les deux cas, les terrains ont aussi subi des limitations qui ont réduit leur valeur économique à presque rien et ont amené leur exploitation au minimum possible ; nonobstant tout cela, dans la pondération des intérêts en conflit, la Cour a conclu que l'ingérence était justifiée.
4. C'est ainsi que, dans le prolongement des décisions rendues dans les affaires Luigi Longobardi et Ansay, nous envisageons la solution à donner à notre affaire.
A notre avis, l'espèce ne relève pas du principe de respect de la propriété (première phrase du premier alinéa de l'article 1 du Protocole no 1, comme le défend la majorité) parce que, en dépit des limitations, le requérant reste toujours propriétaire, mais relève de la réglementation de l'usage des biens, énoncée dans le second alinéa du même article.
De plus, pour nous, les propriétaires des terrains en cause dans l'affaire Ansay et dans la présente affaire se trouvent dans la même situation ; ils sont propriétaires de terrains qui, à un moment donné, ont été classés comme des terrains forestiers et qu'ils doivent exploiter avec toutes les limitations qu'une telle classification impose, dont l'interdiction de construire ou de les exploiter comme des terrains agricoles.
Selon une jurisprudence bien établie, le second alinéa de l'article 1 du Protocole no 1 doit se lire à la lumière du principe consacré par la première phrase de l'article ; en conséquence, une mesure d'ingérence doit ménager un « juste équilibre » entre les impératifs de l'intérêt général et ceux de la sauvegarde des droits fondamentaux de l'individu.
Il doit exister un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
Donc, la question principale à trancher est celle de savoir si le juste équilibre devant régner entre les exigences de l'intérêt général de la communauté et les impératifs de la sauvegarde des droits individuels a été rompu en raison des limitations au droit de propriété du requérant.
En contrôlant le respect de cette exigence, la Cour reconnaît à l'Etat une grande marge d'appréciation tant pour choisir les modalités de mise en œuvre que pour juger si leurs conséquences se trouvent légitimées, dans l'intérêt général, par le souci d'atteindre l'objectif de la loi en cause (Chassagnou et autres c. France [GC], nos 25088/94, 28331/95 et 28443/95, § 75, CEDH 1999-III).
S'agissant de domaines tels que celui de l'environnement, la Cour respecte l'appréciation portée à cet égard par le législateur national, sauf si elle est manifestement dépourvue de base raisonnable (voir, mutatis mutandis, Immobiliare Saffi c. Italie [GC], no 22774/93, § 49, CEDH 1999-V).
Concernant la présente affaire, nous constatons que la qualification de zone forestière donnée au terrain du requérant découle des plans du cadastre et de la confirmation de la Direction générale des forêts en 1990 ; cette qualification, contestée par l'intéressé, a été approuvée en 2000 par un jugement du tribunal de grande instance de Çanakkale qui, à la suite d'un examen approfondi de tous les aspects du problème, a entériné la qualification de domaine forestier donnée au terrain.
Rien dans le dossier ne donne à penser que cette qualification a été arbitraire ou imprévisible.
Donc, l'ingérence litigieuse répond à la condition de légalité.
En outre, le but des limitations imposées au requérant, à savoir la protection de la nature et des forêts, entre dans le cadre de l'intérêt général au sens du second alinéa de l'article 1 du Protocole no 1.
Quant à l'exigence de proportionnalité entre l'ingérence dans le droit de propriété du requérant et le but d'intérêt général poursuivi, il faut souligner que la Cour a dit à maintes reprises que, eu égard aux préoccupations environnementales, très présentes de nos jours, « la mesure litigieuse ne peut être considérée comme causant [au requérant] un préjudice de nature à rendre cette mesure disproportionnée par rapport au but légitime visé » (Kapsalis et Nima-Kapsali c. Grèce (déc.), no 20937/03, 23 septembre 2004).
En conclusion, et malgré l'absence d'indemnisation, nous considérons qu'un juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général et les impératifs de sauvegarde des droits fondamentaux de l'individu a été observé en l'espèce.

Testo Tradotto

Violazione di P1-1; parzialmente inammissibile; Soddisfazione equa riservata
ANZIANA SECONDA SEZIONE
CAUSA KÖKTEPE C. TURCHIA
(Richiesta no 35785/03)
SENTENZA
(merito)
STRASBURGO
22 luglio 2008
Questa sentenza diventerà definitiva nelle condizioni definite all'articolo 44 § 2 della Convenzione. Può subire dei ritocchi di forma.

Nella causa Köktepe c. Turchia,
La Corte europea dei diritti dell'uomo, anziana seconda sezione, riunendosi in una camera composta da:
Francesca Tulkens, presidentessa, Antonella Mularoni, Ireneu Cabral Barreto, Riza Türmen, Vladimiro Zagrebelsky, Danute Jociene, Dragoljub Popovic, giudici,
e di Sally Dollé, cancelliera di sezione,
Dopo avere deliberato in camera del consiglio il 22 aprile 2008 ed il 17 giugno 2008,
Rende la sentenza che ha adottato in questa ultima data:
PROCEDIMENTO
1. All'origine della causa si trova una richiesta (no 35785/03) diretta contro la Repubblica della Turchia e in cui un cittadino di questo Stato, il Sig. H. I. K. ("il richiedente"), ha investito la Corte il 17 ottobre 2003 in virtù dell'articolo 34 della Convenzione di salvaguardia dei diritti dell'uomo e delle libertà fondamentali ("la Convenzione").
2. Il richiedente è stato rappresentato da il Sig. Ö., avvocato a Çanakkale. Il governo turco ("il Governo") è stato rappresentato dal suo agente.
3. Il richiedente adduceva la violazione dell'articolo 1 del Protocollo no 1.
4. Il 8 novembre 2005, la Corte ha deciso di comunicare la richiesta al Governo. Come permette l'articolo 29 § 3 della Convenzione, ha deciso che sarebbero state esaminate l'ammissibilità e la fondatezza della causa allo stesso tempo.
5. Tanto il richiedente che il Governo hanno depositato delle osservazioni scritte complementari (articolo 59 § 1 dell'ordinamento).
6. Un'udienza si è svolta in pubblico al Palazzo dei diritti dell'uomo, a Strasburgo, il 22 aprile 2008, articolo 59 § 3 dell'ordinamento.
Sono comparsi:
-per il Governo
Sigg. A.M. Özmen, co-agente, H.T. Ceyhan,
A. Demir,
Il Sig.re E. Demir,
A. Emüler,
V. Sirmen,
S. Pala,
E. Esin,
Ö. Gazialem,
H. Ardor, consiglieri,;
-per il richiedente
Sig. Sig. Ö., consigliere, il Sig. H.I. K., richiedente.
La Corte ha sentito nelle loro dichiarazioni i Sigg. Özmen e Ö..
IN FATTO
I. LE CIRCOSTANZE DELLO SPECIFICO
7. Il richiedente è nato nel 1955 e ha risieduto a Çanakkale.
A. Il procedimento relativo alla qualifica di "dominio forestale pubblica" data al terreno del richiedente
8. Il 30 gennaio 1953, il Tesoro pubblico vendette ad un individuo un terreno di 21 200 m² ubicati a Saricali (Çanakkale), su decisone della commissione delle terre (Toprak Komisyonu) del 15 giugno 1952. La vendita si realizzò nella cornice di un programma che aveva per obiettivo di fare aderire i contadini alla proprietà. Il terreno fu iscritto a nome dell'individuo in questione sul registro fondiario (appezzamento no 745); era qualificato come campo agricolo (tarla).
9. Dal 1953 al 1993, il terreno cambiò proprietario in quattro riprese. Il 26 luglio 1993, il richiedente l’acquisì. Come ai tre acquirenti precedenti, un titolo di proprietà gli fu rimesso dalla Direzione generale dei titoli e dal catasto.
10. Il 24 agosto 1990, la commissione catastale aveva proceduto nel frattempo, alla delimitazione della dominio forestale pubblica, misura alla conclusione della quale questo appezzamento era stato, in parte (la parte nord, segnalata sugli schizzi coi punti 20 a 24) integrato nei limiti della dominio forestale pubblica. Secondo gli elementi della pratica,lei conclusioni della commissione erano state rese pubbliche il 19 novembre 1990, ma all'epoca nessuna menzione era stata portata sul registro fondiario.
11. Il 17 luglio 1996, il richiedente investe la corte d'appello di Çanakkale ("il tribunale") di un ricorso contro la decisione della Direzione generale delle foreste che apportava la delimitazione delle tenute forestali. Sostenne che l'atto della commissione catastale era inficiato di errore.
12. Il tribunale, così come dei periti (nei campi agricoli, forestali e tecnici) dei rappresentanti delle parti alla controversia e dei testimoni locali si recarono al terreno controverso ai fini di una perizia, e questo a più riprese.
13. Il primo esame dei luoghi si svolse il 10 ottobre 1997. Il 17 ottobre 1997, il rapporto di perizia stabilita dal perito forestale fu inserito nella pratica. Il perito rilevava che la commissione catastale aveva delimitato il terreno con segni di demarcazione numero 19 a 25 e che la parte A del terreno era considerata come "fuori foresta" mentre la parte B era considerata come facente parte della dominio forestale pubblica. Constatava che all'epoca dei fatti il terreno non aveva "manto forestale" ma che dopo gli elementi della pratica no 1995/205, pendenti dinnanzi alla pretura penale di Çanakkale, il richiedente era perseguito per avere effettuato dei lavori che miravano ad annullare la "manto forestale." Osservava anche che il terreno era coperto in alcuni posti di macchia. Concludeva che la totalità del terreno controverso faceva parte della dominio forestale pubblica.
14. Il 30 ottobre 1997, il perito agricolo inserì il suo rapporto nella pratica. Notava che da molto nessuna cultura agricola era stata fatta sul terreno, constatava un dislivello del 15-20% e concludeva che la natura del terreno conferiva a questo le caratteristiche di pascolo.
15. Il 16 dicembre 1997, il richiedente si oppose a questi rapporti e chiese una nuova stima.
16. All'epoca della perizia del 12 aprile 1998, tre periti forestali, un perito agricolo ed una perito tecnico esaminarono il terreno controverso alla luce di fotografie aeree, della cartina del paese e del piano di pianificazione, in presenza in particolare del rappresentante del richiedente.
17. Nel suo rapporto del 28 maggio 1998, il perito agricolo constatava che il terreno controverso doveva essere considerato come un campo agricolo anche se era rappresentato in verde sulla carta del paese del 1957. Notava che si trattava di macchie e di cespugli. La cartina non fu inserita nella pratica perché era vietato farne delle fotocopie. Per ciò che riguarda il dislivello, il perito constatava che nella parte A era del 8-10% mentre nella parte B ammontava al 18-20%.
18. Il 14 luglio 1998, il collegio di tre periti forestali stabilì il suo rapporto basandosi sulla cartina del paese, su una fotografia aerea non inserita nella pratica, essendo vietata la sua fotocopia, sul piano di pianificazione forestale così come sul piano ed il verbale del catasto forestale. Il collegio si riferì inoltre ad una decisione resa il 22 marzo 1996 dalla camera di armonizzazione giurisprudenziale della Corte di cassazione, secondo la quale i titoli di proprietà accordati nel 1953 erano validi dal momento che la zona controversa era costituita, all'epoca pertinente, da macchie e da cespugli e non era considerata come una dominio forestale pubblica. In quanto al dislivello, il collegio constatò che questo ammontava al 6-10% nella parte A ed al 15-20% nella parte B. Alla vista dell'insieme di questi elementi, il rapporto di perizia concludeva, alla maggioranza, che il terreno controverso non dipendeva dalla dominio forestale. Nella sua opinione dissidente, M.K, uno dei periti forestali, stimava che il terreno controverso doveva essere considerato come facente parte della dominio forestale pubblica e che il collegio dei periti non doveva invocare la sentenza della Corte di cassazione.
19. Nel loro rapporto addizionale del 13 aprile 1999, i periti precisarono che una parte del terreno controverso (o 13 625 m²) era coperta da macchie e da cespugli mentre l'altra (o 7 525 m²) era costituita da un campo agricolo.
20. Il 1 settembre 1999, il richiedente inserì nella pratica le sue osservazioni sul rapporto di perizia, in particolare sull'opinione dissidente.
21. Il 30 giugno 2000, un nuovo rapporto di perizia fu stabilito da un altro collegio di tre periti. Il rapporto concludeva, come la commissione di delimitazione, che il terreno controverso dipendeva parzialmente dalla dominio forestale.
22. Il 16 novembre 2000, il tribunale constatò la divergenza delle conclusioni delle perizie inserite nella pratica. Tuttavia, stimò che la decisione della camera di armonizzazione giurisprudenziale della Corte di cassazione non era di natura tale da influire su una perizia come quella effettuata sulla base di cartine. Deliberando alla luce delle conclusioni del rapporto di perizia secondo il quale il terreno controverso dipendeva parzialmente dalla dominio forestale, il tribunale sottolineò che le tenute, all’origine foreste, non erano suscettibili di acquisizione e respinse perciò la domanda del richiedente.
23. Il 6 agosto 2003, il richiedente ricorse in cassazione. Stimava che le perizie effettuate in prima istanza presentavano delle carenze dal momento che non si erano basate su dei piani, delle fotografie di viste aeree e dei piani di pianificazione anteriori al 1945.
24. Il 29 gennaio 2004, la Corte di cassazione respinse questo ricorso e confermò la decisione di prima istanza. Sottolineò che alla vista degli elementi di prova raccolti e dal contenuto della pratica, la controversia riguardava la delimitazione del terreno riguardato nella cornice della legge no 6831, e che nessuno elemento permetteva di stabilire che la commissione di delimitazione aveva qualificato il terreno come macchia, al senso della legge no 5653 sulle foreste. Ora, in virtù della decisione della camera di armonizzazione giurisprudenziale della Corte di cassazione, solo i terreni considerati come macchia potevano avere un valore. Constatò anche che il dislivello di questo era stato misurato al 18% e che, dal momento che questo livello superava il 12%, il terreno doveva essere considerato come appartenente alla foresta.
25. Il 2 luglio 2004, la Corte di cassazione respinse il ricorso in rettifica formato dal richiedente.
B. Il procedimento penale rrivato alla condanna del richiedente
26. Il 17 marzo 1995, il procuratore della Repubblica di Çanakkale accusò il richiedente così come altre persone di avere, il 22 febbraio 1995, disboscato senza autorizzazione, con l'aiuto di un bulldozer, una parte (9 280 m²) del terreno ubicato a Saricali (Çanakkale) e registrato a nome del richiedente sul registro fondiario (appezzamento no 745).
27. Il 19 novembre 1996, il richiedente fu scarcerato dalla giurisdizione penale di prima istanza di Çanakkale ("il tribunale penale").
28. Il 24 dicembre 1997, la Corte di cassazione annullò il giudizio di prima istanza.
29. Il 18 gennaio 1996, il procuratore della Repubblica di Çanakkale aveva accusato nel frattempo, di nuovo il richiedente, questa volta per avere coltivato del grano (il 23 dicembre 1995) sul terreno disboscato.
30. Ad una data non precisata, il tribunale decise di unire le due cause e di aspettare la conclusione del procedimento civile a proposito della delimitazione del terreno, pendente dinnanzi alla corte d'appello di Çanakkale il cui giudizio diventò definitivo il 2 luglio 2004.
31. Il 13 dicembre 2005, il tribunale penale condannò il richiedente, a due riprese, ad una pena di un anno e tre mesi di detenzione, in virtù dell'articolo 93 §§ 1-3 della legge no 6831 sulle foreste. Decise di sospendere l'esecuzione di queste pene per una durata di tre anni, in applicazione dell'articolo 55 §§ 1 e 3 del codice penale, entrato in vigore il 1 giugno 2005. Fondò in particolare il suo giudizio sui seguenti argomenti:
Sebbene l'imputato H. I. [K.] abbia acquistato il terreno controverso e l'abbia fatto iscrivere a suo nome sul registro fondiario, è chiaro che aveva cognizione della restrizione forestale che era diventata definitiva nel 1991, così come l'ha constatato la Corte di cassazione nella sua sentenza di annullamento. Non si potrebbe avanzare che l'interessato abbia disboscato in buona fede, dal momento che la restrizione forestale ha per effetto di invalidare il titolo di proprietà e che l'interessato doveva saperlo. La sua difesa fondata sul carattere non intenzionale della violazione non tiene, visto in particolare che ha coltivato del grano sul terreno controverso dopo che un verbale che constatava la violazione era stato stabilito a suo carico e di cui aveva lui stesso intentato un'azione in annullamento dinnanzi al tribunale civile.
In quanto alle critiche concernenti la perdita di validità giuridica del titolo di proprietà, non entrano nella cornice dell'esame della causa da parte del nostro tribunale. Il tribunale competente su questo punto ha reso la sua decisione che è stata approvata dalla Corte di cassazione. Ecco perché il presente tribunale non potrebbe a questo stadio esaminare la conformità giuridica della restrizione forestale, e dunque la validità giuridica del titolo di proprietà dell'imputato. La domanda di cui è investito il tribunale è l'elemento intenzionale, cioè il punto di sapere se l'imputato aveva un'intenzione delittuosa; come è stato spiegato più sopra, siccome il solo fatto di rivolgersi al tribunale civile che non ha per effetto di annullare l'elemento intenzionale della violazione, il presente tribunale giunge alla conclusione che c'è luogo di sanzionare H. I. [K.] che ha agito con l'elemento intenzionale della violazione" nei due casi.
32. Con una sentenza del 4 febbraio 2008, notificata il 28 maggio 2008, la Corte di cassazione respinse il ricorso del richiedente.
C. Il procedimento relativo all'annullamento del titolo di proprietà del richiedente ed alla sua iscrizione al registro fondiario a nome del Tesoro pubblico
33. Il 28 settembre 2007, il ministero delle Foreste intentò dinnanzi al tribunale catastale di grande istanza di Çanakkale ("il tribunale") un'azione in vista dell'annullamento del titolo di proprietà del richiedente sul terreno controverso e dell'iscrizione di questo a nome del Tesoro pubblico sul registro fondiario. Chiese anche delle misure provvisorie per impedire il trasferimento del terreno a terzi.
34. Lo stesso giorno, il tribunale accolse la domanda di misure provvisorie ed ordinò alla Direzione dei registri fondiari di inserire a questo proposito una menzione nei registri.
35. All'epoca dell'udienza dinnanzi alla Corte europea dei diritti dell'uomo del 22 aprile 2008, è stato precisato che il procedimento era sempre pendente dinnanzi al tribunale e che l’ udienza successiva era contemplata per il 2 luglio 2008.
II. IL DIRITTO E LA PRATICA INTERNI PERTINENTI
A. Le disposizioni costituzionali
36. L'articolo 74 della Costituzione turca del 1924 si legge come segue:
"Nessuno può vedersi espropriare i suoi beni, salvo nel caso in cui l'interesse pubblico è constatato secondo un procedimento regolare e sotto riserva di indennizzo preliminare.
Le modalità di evoluzione delle contropartite all'espropriazione delle terre e delle foreste e dell'ordinamento delle contropartite, ai fini di rendere proprietari i coltivatori e di statalizzare le foreste, sono definite dalle leggi speciali."
37. Le disposizioni pertinenti della Costituzione turca del 1982 sono formulate così:
"XII. Diritto di proprietà
Articolo 35: Ciascuno possiede i diritti di proprietà e di eredità. Questi diritti possono essere limitati dalla legge, ma unicamente ad uno scopo di interesse pubblico. Il diritto di proprietà non può essere esercitato un modo contrario all'interesse della società.
(...)
D. Espropriazione
Articolo 46 [modificato dalla legge no 4709 del 3 ottobre 2001]: Lo stato e le persone giuridiche pubbliche sono autorizzati, nei casi in cui l'interesse pubblico lo rende necessario ed a patto di pagare in contanti la contropartita reale, ad espropriare, in tutto o in parte, i beni immobiliari che appartengono agli individui, o a stabilire su questi beni delle servitù amministrative, conformemente alle regole e ai procedimenti fissati dalla legge.
L'indennità di espropriazione e l'indennità del plusvalore fissato da una decisione passata in forza di cosa giudicata è pagata in contanti. Tuttavia, la legge fissa la modalità di pagamento delle indennità dovute in ragione dell'espropriazione di terre nella cornice dell'applicazione della riforma agraria, della realizzazione dei grandi progetti in materia di energia e di irrigazione, della realizzazione di progetti di alloggio, dell'allestimento di nuove foreste, della protezione delle rive e delle espropriazioni fatte a fini turistici. In questi casi, la legge può prevedere un pagamento rateale, ma il termine di pagamento non può superare cinque anni; all'occorrenza, le tranche di pagamento saranno uguali.
Quando il controvalore della parte delle terre espropriate appartiene direttamente ai piccoli coltivatori il gestore è pagato in ogni caso in contanti.
Le tranche di pagamento, nel caso contemplato al capoverso 2, e le indennità di espropriazione che restano dovute, qualunque sia la causa, saranno aumentate di interessi al tasso più elevato applicabile ai debiti pubblici.
E. Statalizzazione e privatizzazione
Articolo 47 [modificato dalla legge no 4446 del 13 agosto 1999]: Le imprese private che hanno il carattere di un servizio pubblico possono essere statalizzate nei casi in cui l'interesse pubblico lo esiga.
La statalizzazione è effettuata sulla base del controvalore reale. La legge definisce il modo ed il procedimento di calcolo di questo controvalore.
I principi e i procedimenti relativi alla privatizzazione delle imprese e ricchezze appartenenti allo stato, alle imprese economiche pubbliche ed a altre persone giuridiche pubbliche sono fissati dalla legge.
La legge determina quali investimenti e servizi forniti dallo stato che si possono affidare alle imprese economiche pubbliche e le altre persone giuridiche pubbliche o che possono essere cedute a persone fisiche o giuridiche in virtù di contratti di diritto privato.
(...)
IV. Foreste e contadini delle regioni forestali
A. Conservazione e sviluppo delle foreste
Articolo 169: Lo stato adotta le leggi e le misure necessarie in vista di preservare le foreste e di ingrandire le zone forestali. Procede al rimboscamento degli spazi forestali incendiati, dove è vietato concedersi ad una forma qualsiasi di agricoltura o di allevamento. Tutte le foreste sono poste sotto la guardia dello stato.
La proprietà delle foreste di stato è inalienabile. Lo stato gestisce e sfrutta queste foreste conformemente alla legge. Non possono essere oggetto di una prescrizione acquisitiva e non possono essere colpite da servitù, salvo nell'interesse pubblico.
Nessun atto o attività di natura tale da causare danno alle foreste possono essere autorizzati. Non si può fare alcuna propaganda politica suscettibile di provocare la distruzione delle foreste, né decretare un’ amnistia generale o particolare che preveda esclusivamente le violazioni in materia forestale. Le leggi di amnistia generale e particolare non possono includere le violazioni commesse allo scopo di incendiare o di distruggere una foresta o di ridurre una zona forestale.
I limiti delle foreste non possono essere arretrati, salvo per ciò che riguarda, da una parte, le zone il cui mantenimento in quanto foreste non presenta nessuno interesse scientifico, teorico o pratico, ma per le quali è stabilito al contrario che c'è un interesse certo nel trasformarli in zone agricole, così come i terreni che, prima del 31 dicembre 1981, hanno perso integralmente il carattere di foreste sul piano scientifico, tanto dal punto di vista teorico che pratico, e per i quali è stato constatato che c'era un interesse a sfruttarli ai fini agricole vari, per esempio in quanto campi, vigneti, frutteti, oliveti o in vista dell'allevamento, e, dall’altra parte, i settori delle città, borgate e villaggi dove le abitazioni sono concentrate. "
B. Il codice civile
38. Le disposizioni pertinenti del codice civile turco si leggono come segue:
Articolo 683 § 1: "Chiunque possieda una cosa può utilizzarla, goderne e disporne come desidera, nei limiti del sistema giuridico. "
Articolo 705 § 1: "L'acquisizione del bene immobiliare si realizza con l'iscrizione. "
Articolo 1007 § 1: "Lo stato è responsabile di ogni danno risultante dal campo dei registri fondiari."
C. Le leggi sulle foreste
39. Fino al 1937, le foreste non erano oggetto di nessuna regolamentazione speciale. Tra il 3 febbraio 1937 ed il 31 agosto 1956, cinque leggi principali concernenti l’ambito forestale furono promulgate: le leggi numero 3116 (1937), 4785 (1945), 5653 (1950), 5658 (1950) e 6831 (1956).
1. La legge no 3116 dell’ 8 febbraio 1937
40. L'articolo 1 di questa legge definisce la nozione di "foresta." Secondo l'articolo 3, esistono quattro tipi di foreste: le foreste di stato, le foreste che appartengono alle collettività pubbliche, le foreste delle fondazioni e le foreste private. Queste ultime appartengono allo stato ma sono sfruttate dagli individui che pagano un'imposta a questo scopo.
2. La legge no 4785 del 9 luglio 1945
41. L'articolo 1 di questa legge si legge come segue:
"In data dell'entrata in vigore della presente legge, tutte le foreste concernenti l persone reali o giuridiche, degli individui, delle fondazioni e dei villaggi, delle municipalità, delle amministrazioni e delle persone giuridiche di dritto pubblico sono statalizzate in virtù della presente legge. Le foreste sono trasferite allo stato senza che un atto o una notificazione qualsiasi siano necessari. "
42. L'articolo 4 di questa legge contempla delle eccezioni alla statalizzazione, in particolare per ciò che riguarda le foreste che contengono certe tipi di alberi piantati dalle cure di individui.
43. L'articolo 7 di questa legge contempla un indennizzo in caso di statalizzazione.
3. La legge no 5653 del 24 marzo 1950
44. La legge no 5653 ridefinisce l’ambito forestale. Secondo l'articolo 1 § c di questa legge, la macchia non è più considerata come foresta, a meno che i terreni coperti da macchia siano protetti o producano dei raccolti, secondo le condizioni definite da questa legge.
45. Sempre secondo l'articolo 1, a contare dal 3 aprile 1950, le tenute che hanno perso il carattere di foresta non saranno più considerate siccome tale.
46. Questa legge distingue tre tipi di tenute forestali: le foreste di stato, le foreste che appartengono a persone giuridiche, come i villaggi e le municipalità, e le foreste private.
4. La legge no 5658 del 24 marzo 1950
47. L'articolo 1 della legge no 5658 contempla la restituzione delle foreste statalizzate a certe condizioni:
"Tra le foreste statalizzate dalla legge no 4785 del 9 luglio 1945, le foreste che non si trovano dentro a foreste di stato e che sono vincolate da tenute agricole come campi, vigneti, giardini, luoghi come foreste private, città, borgate, pascoli di villaggi, e le foreste appartenenti ai villaggi, delle persone giuridiche municipali o delle persone reali, e che sono vincolate da tenute non qualificate come foreste secondo l'articolo 1 della legge sulle foreste, a patto di essere separate interamente dalle foreste di stato, sono restituite su richiesta ai loro proprietari o ai loro eredi."
5. La legge no 6831 del 31 agosto 1956
48. L'articolo 1 di questa legge definisce la nozione di "foresta" e le sue eccezioni.
49. Secondo l'articolo 2 § B, come modificato il 5 giugno 1986 dalla legge no 3302,:
"I luoghi che hanno perso integralmente il loro carattere di foresta sul piano scientifici e tecnico prima della data del 31 dicembre 1981 sono esclusi dai limiti di foresta, da una parte se è stato constatato che c'era un interesse ad utilizzarli a fini agricoli diversi in quanto campi, vigneti, giardini, allestimenti di alberi da frutto, di olivi, di noccioli o di alberi da pistacchio o pinoli (pistacchi, pinoli), o a fini dell’ allevamento, e dall’ altra parte se si tratta di settori di una città, di una borgata o di un villaggio dove l'abitazione è concentrata.
I luoghi esclusi dai limiti della foresta sono messi a profitto del Tesoro pubblico se appartenevano già allo stato, o a profitto delle instaurazioni pubbliche dotate della personalità giuridica morale se appartenevano già a loro, o a profitto dei loro proprietari se le zone in questione fossero delle foreste private. Le rettifiche ed iscrizioni richieste sono realizzate definitivamente nel registro fondiario quando il procedimento [di esclusione delle foreste] diventa definitivo.
Nessuno altro restringimento delle zone forestali può avere luogo all'infuori dei luoghi precisati. (...) ."
50. Secondo l'articolo 4, esistono dal punto di vista della proprietà e dell'amministrazione tre tipi di foreste: le foreste di stato (articoli 7 a 44), le foreste che appartengono a persone giuridiche amministrative (articoli 45 a 49) e le foreste private (articoli 50 a 55).
51. Secondo l'articolo 7 di questa legge, la natura di una tenuta-foresta di stato o foresta privata -è definita dalle commissioni catastali. Peraltro, gli articoli 7 a 12 della legge regolano le modalità di lavoro delle commissioni catastali.
52. Le foreste di stato sono sotto la protezione dello stato. Ogni atto che altera la natura forestale delle foreste di stato è vietato, articoli 14 a 19 in particolare, e costituisce una violazione. Gli articoli dal 79 al 90 indicano i procedimenti applicabili al perseguimento degli atti contrari alla legge. Delle disposizioni di ordine penale figurano negli articoli dal 91 al 114. Le pene contemplate per certe violazioni possono essere ridotte se l'autore dell'atto che costituisce la violazione è il proprietario della tenuta in questione (vedere, per esempio, l'articolo 91 § 6).
53. Le foreste private sono sottoposte all'ispezione ed al controllo dello stato. I loro proprietari hanno un diritto di sfruttamento limitato. Hanno peraltro, in particolare il diritto di costruire, su una superficie che non supera il 6% della superficie totale del terreno (articolo 52 § 2) se la foresta privata riguardata si trova in una zona di abitazione (villaggio, borgata o città).
54. La legge no 6831 è stata modificata a più riprese, con le leggi numero 1744 (1973), 2896 (1983), 3302 (1986), 3373 (1987), 3493 (1988), 4079 (1995), 114 (1995), 4570 (2000), 4999 (2003), 5177 (2004), 5192 (2004) e 5728 (2008).
D. La legge no 3402 del 21 giugno 1987
55. Secondo l'articolo 11 della legge no 3402 relativa al catasto, intitolato "la pubblicazione dei risultati dei lavori catastali", il direttore del catasto fa pubblicare le constatazioni catastali, tramite affissione, alla direzione del catasto ed al posto di lavoro del sindaco del villaggio (muhtar), per una durata di trenta giorni. Gli interessati possono investire il tribunale del catasto in questo termine di pubblicazione se hanno delle obiezioni da formulare contro queste constatazioni. Il direttore del catasto è tenuto a compiere al più tardi queste formalità di pubblicazione nei tre mesi seguenti la fine dei lavori di catasto effettuati dalla squadra catastale. Si presume che la pubblicazione effettuata in virtù di questa legge sia stata notificata direttamente alle persone fisiche riguardate ed alle persone giuridiche di dritto pubblico e privato.
56. Inoltre, l'articolo 12 della legge no 3402, intitolato "acquisizione del carattere definitivo dei verbali di catasto e prescrizione estintiva", contempla che le limitazioni e le constatazioni contenute nei verbali di catasto contro i quali nessuna azione è intentata nel termine di pubblicazione di trenta giorni diventano definitive alla scadenza di questo termine. Le iscrizioni necessarie sono effettuate al più tardi nel registro fondiario nei tre mesi che seguono le date in cui i verbali o i giudizi pertinenti sono diventati definitivi.
Nessuna opposizione o azione in giustizia fondata su degli elementi di prova anteriore ai lavori di catasto è possibile dopo la scadenza di un termine di dieci anni a partire dalla data in cui i verbali di catasto hanno acquisito un carattere definitivo.
Le vecchie iscrizioni nel registro fondiario effettuate prima dei lavori di catasto perdono la loro validità, così che non è più possibile stabilire degli atti sulla base di queste dinnanzi alla Direzione generale dei titoli e del catasto.
E. La giurisprudenza nazionale
57. Il 23 giugno 1964, la Corte costituzionale annullò gli articoli 3 e 4 della legge no 4785 sulle foreste, in ragione delle contraddizioni esistenti con l'articolo 38 della costituzione dell'epoca che prendeva il valore reale del bene come base dell'indennità di espropriazione. L'articolo 3 indicava che il valore di una foresta statalizzata era stimato a partire dalla dichiarazione di imposta. In quanto all'articolo 4, definiva i criteri relativi all'acquisto delle costruzioni presenti in una foresta statalizzata. Alla domanda di sapere se l'annullamento degli articoli riguardati andava a creare in materia un vuoto giuridico, la Corte costituzionale rispose nei seguenti termini:
"(...) quando le disposizioni controverse saranno annullate, le disposizioni generali della legge sull'espropriazione saranno applicate all'espropriazione delle foreste."
58. Il 28 marzo 1995, la Corte di cassazione constatò che il Tesoro pubblico era responsabile del buon mantenimento dei registri fondiari, in virtù dell'articolo 917 del vecchio codice civile. Nella sua sentenza, enumerò i criteri che permettono di impegnare la responsabilità del Tesoro pubblico: l'esistenza di un danno, l'esistenza di un atto di un funzionario che è contrario al diritto, e l'esistenza di un legame di causalità tra il danno e gli atti. Precisò anche che il danno doveva essersi realizzato in modo definitivo e che la domanda doveva essere introdotta entro un anno a partire dalla realizzazione definitiva del danno e, ad ogni modo, in un termine prescrittivo generale di dieci anni.
59. In una sentenza del 26 aprile 1999, la Corte di cassazione ripeté che il Tesoro pubblico era responsabile del buon mantenimento dei registri fondiari, in virtù dell'articolo 917 del vecchio codice civile. Nell'occorrenza, l'interessato non aveva potuto fare applicare certe misure provvisorie al bene immobiliare del suo debitore perché i registri fondiari non erano stati tenuti secondo le regole.
60. Il 7 maggio 2002, l'assemblea generale delle camere riunite del Consiglio di stato (Danistay Dava Daireleri Genel Kurulu) constatò che la competenza ritornava al giudice giudiziale in caso di annullamento di un titolo di proprietà da parte del tribunale catastale per il motivo che il terreno controverso era stato parte della tenuta forestale (in seguito, questa tenuta era stata esclusa dalla tenuta forestale pubblica perché aveva perso il carattere di foresta). In questa causa, i giudici amministrativi avevano respinto la domanda di indennizzo basandosi sul giudizio del tribunale catastale che aveva annullato il titolo di proprietà dell'interessato. Avevano stimato che questo giudizio era conforme al diritto.
61. Nella sua sentenza del 7 maggio 2002, la prima camera della Corte di cassazione annullò il giudizio del tribunale del merito che aveva rifiutato la domanda dell'interessato e constatò che la responsabilità obiettiva dello stato doveva essere impegnata in ragione degli atti dei funzionari della commissione catastale che avevano concluso erroneamente che il terreno controverso non faceva parte della tenuta forestale pubblica. In ragione di questo atto nessuna menzione era stata inserita difatti, nel registro fondiario in quanto alla natura forestale del terreno che era stato venduto a terzi che si erano affidati ai registri. Nell'occorrenza, il terreno controverso era stato registrato a nome di terzi in seguito alle conclusioni della commissione catastale, nel 1959, e per la prima volta un atto di proprietà era stato stabilito a loro nome. Il richiedente aveva acquisito il terreno nel 1994 sulla base delle informazioni che figuravano nel registro fondiario che non faceva nessuna menzione alla natura forestale del terreno. Nel 1977-1982, la commissione catastale condusse dei nuovi lavori e concluse che il terreno controverso non faceva più parte della tenuta forestale perché questo aveva perso le caratteristiche di foresta. Decise di escluderlo dalla tenuta forestale. Questa menzione fu portata sul registro fondiario nel 1995.
62. Il 30 ottobre 2006, la terza camera della Corte di cassazione approvò il giudizio della pretura del 12 giugno 2006 secondo il quale il giudice amministrativo era competente per le controversie concernenti le domande di indennizzo legate alla registrazione del terreno in seguito ai lavori della commissione catastale. Nell'occorrenza, il terreno era stato acquisito dall'interessato nel 1953. Poi era stato iscritto il suo nome in seguito ai lavori della commissione catastale. Più tardi, il titolo di proprietà dell'interessato era stato annullato dal tribunale per il motivo che faceva parte della tenuta forestale. Il tribunale aveva respinto la domanda nei seguenti termini:
"Il richiedente richiede un'indennità basandosi sui due atti amministrativi che sono l'emissione del titolo di proprietà e l'invalidazione di questo tramite la delimitazione forestale. Il richiedente stima peraltro che l'amministrazione ha commesso una mancanza nella misura in cui lui stesso, titolare del titolo di proprietà, non si è visto notificare il risultato della delimitazione forestale consecutiva ai lavori effettuati. Una domanda di indennizzo di un danno causato da un atto amministrativo può essere effettuata solo dinnanzi al tribunale amministrativo, con un ricorso di pieno dritto."
Il 30 gennaio 2008, alla domanda del Sig. Ö., rappresentante del richiedente nella suddetta causa, anche rappresentante del richiedente nella presente causa, formulata il 5 dicembre 2007, il primo consiglio della presidenza della Corte di cassazione (Yargitay Birinci Baskanlik Kurulu) rispose che non esisteva contraddizione tra le due sentenze precedenti e che perciò non era necessario ricorrere al procedimento di armonizzazione della giurisprudenza.
63. Con una sentenza del 19 aprile 2006, l'assemblea generale della Corte di cassazione approvò il giudizio del tribunale del merito che aveva constatato la responsabilità obiettiva dello stato in ragione di atti dei funzionari della Direzione dei registri fondiari. Nell'occorrenza, nel 1976 un terzo aveva venduto un terreno al richiedente utilizzando una falsa decisione di giustizia, mentre nel 1954 il terreno in questione era stato classificato dalla commissione catastale come pascolo (mera) ed era entrato di conseguenza a far parte della tenuta pubblica. Il tribunale del merito aveva accolto parzialmente la domanda ed aveva accordato un'indennità per la casa che il richiedente aveva costruito e gli alberi che aveva piantato sul terreno controverso. La Corte di cassazione notò che la possibilità per il richiedente di ritorcersi contro il terzo non esonerava l'amministrazione dalla sua responsabilità obiettiva. Anche in assenza di manchevolezza, lo stato era responsabile a partire da dal momento in cui tre condizioni si trovavano riunite: l'esistenza di un atto inficiato di errore, l'esistenza di un danno e l'esistenza di un legame di causalità tra l’atti inficiato di errore ed il danno. Peraltro, la Corte di cassazione fece riferimento alle disposizioni del codice civile che protegge la buona fede di una nessuno che si è fidato del registro fondiario.
64. Il 26 giugno 2006, il tribunale amministrativo di Bursa respinse una domanda di indennizzo per il danno che il richiedente adduceva avere subito a causa dell'annullamento del suo titolo di proprietà perché il suo terreno faceva parte della tenuta forestale. Il richiedente si era rivolto al tribunale amministrativo dopo avere investito il giudice giudiziale che si era dichiarato incompetente ratione materiae. Secondo il tribunale amministrativo, la domanda era tardiva perché il richiedente avrebbe dovuto introdurre la sua domanda nei sessanta giorni a partire dalla data in cui il giudizio che annullava il suo titolo di proprietà era diventato definitivo.
65. Secondo il documento inserito nella pratica dal Governo, il Sig. Ö. (rappresentante del richiedente nella causa presente) si rivolse a nome di uno dei suoi clienti al tribunale amministrativo di Bursa per chiedere l'impegno della responsabilità obiettiva dello stato. In questa causa, il titolo di proprietà del suo cliente era stato annullato in ragione per il fatto che il suo terreno faceva parte della dominio forestale pubblica. Nel suo ricorso, spiegò che la sua domanda era stata respinta dalla pretura di Çanakkale che si era dichiarata incompetente ratione materiae. Dopo avere invocato i problemi di competenza tra le differenti giurisdizioni, il Sig. Ö. chiese al tribunale amministrativo di trasferire la causa dinnanzi al tribunale dei conflitti per evitare un nuovo giudizio di incompetenza. Sollecitò anche di mandare la causa dinnanzi alla Corte costituzionale, in ragione dei conflitti, secondo lui, tra le disposizioni in materia di diritto delle proprietà e sulle foreste.
IN DIRITTO
66. Il richiedente sostiene che la qualifica di tenuta forestale pubblica data al suo terreno, senza versamento di una qualsiasi indennità, costituisce un attentato sproporzionato al suo diritto al rispetto dei suoi beni al senso dell'articolo 1 del Protocollo no 1. Si lamenta anche dell'articolo 6 § 1 della Convenzione.
I. SULLA VIOLAZIONE ADDOTTA DELL'ARTICOLO 1 DEL PROTOCOLLO NO 1
A. Sull'ammissibilità
67. Il Governo invita innanzitutto la Corte a dichiarare questa lagnanza inammissibile per il motivo che la causa in questione era ancora pendente dinnanzi alle istanze nazionali in data della sua introduzione.
68. La Corte constata che il procedimento interno concernente la delimitazione del terreno si è concluso il 2 luglio 2004 dalla sentenza della Corte di cassazione. Ricorda che tollera che l'ultimo grado dei ricorsi interni sia raggiunto dopo il deposito della richiesta, ma prima che sia chiamata a pronunciarsi sull'ammissibilità (vedere, mutatis mutandis, Ringeisen c. Austria, sentenza del 16 luglio 1971, serie A no 13, p. 38, § 91, ed E.K. c. Turchia, déc.), no 28496/95, 28 novembre 2000). Perciò, respinge questo ramo dell'eccezione.
69. Poi, il Governo chiede alla Corte di dichiarare la richiesta inammissibile nella misura in cui il richiedente non ha formulato nessuna obiezione contro la decisione della commissione catastale resa pubblica il 19 novembre 1990.
70. Il richiedente si oppone alla tesi del Governo. Sostiene che ha acquisito il terreno controverso in buona fede, fidandosi del registro fondiario.
71. La Corte constata che il richiedente non aveva, materialmente, la possibilità di opporsi alle conclusioni della commissione del catasto del 19 novembre 1990, perché non era ancora il proprietario. Peraltro, nota che nessuno elemento obiettivo della pratica permette di stabilire che, all'epoca dell'acquisto del terreno controverso nel 1993, c'era un'iscrizione sul registro fondiario che riguardante la sua qualifica come forestale né che il richiedente aveva cognizione di questa qualifica. Infine, la Corte ricorda che le giurisdizioni interne non hanno dichiarato inammissibili l’istanza del richiedente in ragione di un problema di mancata osservanza del termine. Hanno proceduto ad un esame del merito della causa e hanno respinto l’istanza. Anche questo ramo dell'eccezione deve essere quindi respinto.
72. Il Governo sostiene infine che il richiedente si sarebbe potuto rivolgere all'amministrazione per chiedere un'indennità e, in caso di rifiuto esplicito o implicito, intentare un'azione per il danno subito dall'annullamento del suo titolo di proprietà sul fondamento delle disposizioni pertinenti della Costituzione -secondo le quali tutti gli atti e le decisioni dell'amministrazione possono essere oggetto di un ricorso giudiziale -o su quello delle disposizioni pertinenti del codice di procedimento amministrativo. A questo riguardo, si riferisce alla giurisprudenza nazionale ricordata più sopra. Ricorda anche che il Sig. Ö. stesso (rappresentante del richiedente nella presente causa) si è rivolto al tribunale amministrativo di Bursa, il 11 dicembre 2006, per fare valere la responsabilità obiettiva dello stato in materia, e che il procedimento è sempre pendente (paragrafo 65 sopra).
73. Il richiedente contesta questi argomenti. Sostiene che non esiste a livello amministrativo nessuna via di ricorso interno che bisogna esaurire per lamentarsi di un giudizio definitivo in quanto alla qualifica di un terreno come tenuta forestale pubblica. Per ciò che riguarda la giurisprudenza invocata dal Governo, stima che ha avuto dei casi isolati ma che dal principio simile istanza non ha nessuna fortuna reale di successo. In appoggio alla sua tesi, rinvia a sua volta a giudizi concernenti la pratica interna in materia.
74. Per ciò che riguarda la possibilità di chiedere un'indennità in virtù del principio secondo il quale tutti gli atti e le decisioni dell'amministrazione possono essere oggetto di un ricorso giudiziale, la Corte ricorda che ha respinto già un'eccezione simile nella causa Dogrusöz ed Aslan c. Turchia (no 1262/02, §§ 22-23, 30 maggio 2006) per il motivo che questi ricorsi riguardano solamente il caso dell'annullamento illegale dell'iscrizione di un titolo sul registro fondiario. Ora, nello specifico, il tribunale catastale di Çanakkale ha respinto la domanda del richiedente in quanto alla delimitazione, conformemente alla legislazione relativa alla tenuta forestale secondo la quale i terreni che fanno parte di questa tenuta non possono appartenere ad un individuo (vedere, mutatis mutandis, Mehmet Ali Miçoogullari c. Turchia, no 75606/01, § 17, 10 maggio 2007).
75. Per ciò che riguarda il fatto di esigere dal richiedente che faccia una nuova istanza per ottenere un'indennità sul fondamento della responsabilità obiettiva dello stato, dopo il rigetto della sua istanza iniziale concernente l'annullamento della delimitazione del suo terreno in quanto tenuta forestale pubblica come negli esempi menzionati più sopra, la Corte ricorda che l'obbligo derivante dall'articolo 35 § 1 si limita a quello di fare un uso verosimilmente normale di ricorsi efficaci, sufficienti ed accessibili (Sofri ed altri c. Italia, déc.), no 37235/97, CEDH 2003-VIII). In particolare, la Convenzione prescrive solo l'esaurimento dei ricorsi al tempo stesso relativi alle violazioni incriminate, disponibili ed adeguati. Questi ricorsi devono esistere non solo ad un grado sufficiente di certezza in teoria ma anche in pratica, altrimenti manca loro l'effettività e l'accessibilità voluta (Akdivar ed altri c. Turchia, sentenza del 16 settembre 1996, Raccolta delle sentenze e decisioni 1996-IV, p. 1210, § 66).
76. Nell'occorrenza, la Corte nota innanzitutto che, nei giudizi invocati dal Governo, i tribunali interni hanno considerato che le iscrizioni nei registri fondiari che avevano causato un danno ai titolari in buona fede di titoli di proprietà erano state fatte in seguito ad un "errore", anche se questo non era il risultato di una mancanza dell'agente di stato; ora nell'occorrenza niente dimostra che il titolo di proprietà del richiedente o quelli dei precedenti proprietari dal 1953 sono stati stabiliti in seguito ad un errore. Non è contestato dalle parti che nel 1953 il Tesoro pubblico ha venduto il terreno controverso come campo agricolo ad un individuo e che il richiedente è stato il quinto proprietario ad acquisirlo, fidandosi del registro fondiario che non menzionava per niente la sua qualifica di tenuta forestale pubblica. I tribunali interni hanno respinto l’istanza del richiedente in quanto alla delimitazione sulla base degli elementi raccolti durante il procedimento, non in ragione di un atto inficiato di errore commesso dagli agenti dell'amministrazione che nel 1953 hanno qualificato il terreno come campo agricolo, ma tenuto conto delle disposizioni legislative applicabili in materia.
Poi, alla luce della giurisprudenza invocata dalle due parti, la Corte stima che il Governo non ha mostrato per niente in quale misura tale ricorso potrebbe essere efficace, sufficiente ed accessibile, avuto riguardo delle disposizioni interne concernenti la qualifica di tenuts forestale pubblica data ad un terreno che appartiene ad un individuo.
Infine, senza speculare in materia sulla conclusione dei procedimenti dinnanzi alle giurisdizioni turche supreme, la Corte stima che nell'occorrenza non sarebbe opportuno chiedere al richiedente che ha aspettato già dal 1996 al 2004 una decisione concernente la natura del terreno in questione, di impegnare un nuovo procedimento per ottenere un'indennità (vedere, mutatis mutandis, Guillemin c. Francia, sentenza del 21 febbraio 1997, Raccolta 1997-I, § 50).
77. In conclusione, la Corte constata che questa lagnanza non è manifestamente mal fondata al senso dell'articolo 35 § 3 della Convenzione. Rileva peraltro che non incontra nessuno altro motivo di inammissibilità. Conviene dichiararla ammissibile dunque.
B. Sul merito
78. Il richiedente sostiene che la qualifica di tenuta forestale pubblica data al suo terreno ed il giudizio dei tribunali interni che respingono il suo ricorso contro questa qualifica, senza versamento di una qualsiasi indennità, costituisce un attentato sproporzionato al suo diritto al rispetto dei suoi beni al senso dell'articolo 1 del Protocollo no 1 che è formulato così:
"Ogni persona fisica o giuridica ha diritto al rispetto dei suoi beni. Nessuno può essere privato della sua proprietà se non a causa di utilità pubblica e nelle condizioni previste dalla legge e dai principi generali del diritto internazionale.
Le disposizioni precedenti non recano offesa al diritto che possiedono gli Stati di mettere in vigore le leggi che giudicano necessarie per regolamentare l'uso dei beni conformemente all'interesse generale o per garantire il pagamento delle imposte o di altri contributi o delle multe. "
1. Gli argomenti delle parti
a) Il richiedente
79. Secondo il richiedente, i tribunali nazionali hanno respinto la sua istanza di annullamento della qualifica di tenuta forestale pubblica data al suo terreno, mentre era chiaro che si trattava di un terreno agricolo. Il terreno aveva al tempo stesso questa natura nel 1953, all'epoca della prima vendita da parte Tesoro pubblico, e nel 1993 quando l'ha lui stesso acquistato. Giuridicamente e tecnicamente il terreno dovrebbe potere, dunque non essere qualificato come tenuta forestale pubblica. Però, poiché è qualificato così, lo stato deve indennizzarlo mettendo in atto il procedimento di espropriazione, nella misura in cui la restrizione nell'occorrenza equivale ad una privazione di proprietà. A questo riguardo, contesta la tesi del Governo secondo la quale la restrizione controversa costituisce una semplice limitazione dell'utilizzazione del suo diritto di proprietà come nella causa Ansay c. Turchia, déc.), no 49908/99, 2 marzo 2006. Ricorda che dopo tale delimitazione, il fatto di utilizzare il suo terreno gli è diventato impossibile e può valergli una condanna penale. Agli occhi del richiedente, la delimitazione del terreno controverso, senza versamento di nessuno compenso, costituisce un'espropriazione di facto ed implica un attentato sproporzionato al suo diritto al rispetto dei suoi beni.
b) Il Governo,
80. Riferendosi alla giurisprudenza della Corte in materia ( Dagalas ed altri c. Turchia, déc.), no 51326/99, 29 settembre 2005; Özden c. Turchia, déc.), no 11841/02, 3 maggio 2007; Gündüz c. Turchia, déc.), no 50253/07, 18 ottobre 2007; e Pekinel c. Turchia, no 9939/02, 18 marzo 2008) il Governo sostiene che il richiedente non aveva né un "bene reale", né una "speranza legittima" di vedersi concretizzare un qualsiasi credito reale ed esigibile al senso dell'articolo 1 del Protocollo no 1, perché quando ha acquistato il terreno nel 1993 sapeva o avrebbe dovuto sapere che questo era stato qualificato come tenuta forestale pubblica nel 1990. Peraltro, rinviando alla causa Ansay c. Turchia, il Governo sostiene che la restrizione portata al diritto di proprietà del richiedente inseguiva un scopo legittimo ed era proporzionata.
2. La valutazione della Corte
81. La Corte ricorda che, secondo la sua giurisprudenza, l'articolo 1 del Protocollo no 1 che garantisce in sostanza il diritto di proprietà, contiene tre norme distinte (vedere, in particolare, James ed altri c. Regno Unito, sentenza del 21 febbraio 1986, serie A no 98, pp. 29-30, § 37): la prima che si esprime nella prima frase del primo capoverso e riveste un carattere generale, enuncia il principio del rispetto della proprietà; la seconda, che figura nella seconda frase dello stesso capoverso, prevede la privazione di proprietà e la sottopone a certe condizioni; in quanto alla terza, registrata nel secondo capoverso, riconosce agli Stati contraenti il potere, tra altri, di regolamentare l'uso dei beni conformemente all'interesse generale. La seconda e la terza norma che hanno fatto riferimento agli esempi particolari di attentati al diritto di proprietà, si devono interpretare alla luce del principio consacrato dalla prima (Bruncrona c. Finlandia, no 41673/98, §§ 65-69, 16 novembre 2004, e Broniowski c. Polonia [GC], no 31443/96, § 134, CEDH 2004-V).
82. Per ciò che riguarda l'esistenza di un bene al senso dell'articolo 1 del Protocollo 1, la Corte non potrebbe seguire la tesi del Governo. Nota che il caso specifico si distingue dalle cause invocate dal Governo, nella misura in cui non è stato dimostrato da nessuno elemento obiettivo che il richiedente aveva avuto cognizione della delimitazione all'epoca del suo acquisto del terreno, non contenendo i registri fondiari nessuna annotazione. Ad ogni modo, si potrebbe contestare che, secondo il diritto e le pratica interni, il detentore di un titolo di proprietà valida ha il diritto di protestare contro le restrizioni portate in seguito ai lavori dalle commissioni catastali, questo per un periodo di dieci anni a contare dalla loro notificazione. In altri termini, il detentore di tale titolo di proprietà può sperare di avere perfettamente un bene senza restrizione fino al momento in cui la delimitazione diventa definitiva in virtù di un giudizio definitivo in materia. Il richiedente ha "un bene" al senso dell'articolo 1 del Protocollo no 1 dunque (vedere, tra altri, Kopecký c. Slovacchia [GC], no 44912/98, § 35, CEDH 2004-IX).
83. In quanto all'esistenza dell'ingerenza, la Corte constata che le parti si accordano ad ammettere che c'è stata ingerenza nel diritto al rispetto dei beni del richiedente in ragione della qualifica di tenuta forestale pubblica data al terreno controverso. Tuttavia, divergono in quanto agli effetti dell'ingerenza.
84. Nell'occorrenza, il richiedente qualifica la delimitazione di espropriazione di facto, mentre il Governo sostiene che la situazione controversa dipende dalla regolamentazione dell'uso dei beni.
85. La Corte rileva che gli effetti della restrizione controversa denunciata dal richiedente derivano tutti da un'importante riduzione della disponibilità del bene in causa (paragrafo 90 sotto) che deve essere esaminata sotto l'angolo della prima frase del primo capoverso dell'articolo 1 del Protocollo no 1.
86. La Corte rileva, innanzitutto, che non è provato per niente che il richiedente non era in buona fede al momento dell'acquisizione del terreno in questione e sottolinea che deteneva un titolo di proprietà valido.
87. La Corte constata, poi, che le autorità competenti hanno, con una decisione giudiziale, qualificato il terreno controverso come tenuta forestale pubblica (paragrafi 10 e 22 sopra). Malgrado l'opposizione esercitata dal richiedente in virtù del diritto interno in quanto alla natura del terreno, i tribunali interni hanno convalidato alla fine la delimitazione in questione, in applicazione delle disposizioni costituzionali, basandosi sui rapporti di perizia secondo i quali il terreno faceva parte della tenuta forestale. Avuto riguardo delle motivazioni avanzate dalle giurisdizioni nazionali, la Corte stima che lo scopo della privazione imposta al richiedente, ossia la protezione della natura e delle foreste, introduca nella cornice dell'interesse generale al senso della seconda frasedel primo capoverso dell'articolo 1 del Protocollo no 1( Lazaridi c. Grecia, no 31282/04, § 34, 13 luglio 2006). Ricorda a questo riguardo che se nessuna disposizione della Convenzione è destinata specialmente a garantire una protezione generale dell'ambiente in quanto tale (Kyrtatos c. Grecia, no 41666/98, § 52, CEDH 2003-VI) la società di oggi si preoccupa senza tregua di preservarlo di più (Fredin c. Svezia (no 1), sentenza del 18 febbraio 1991, serie A no 192, § 48.) Nota che ha trattato molte volte di istanze legate alla protezione dell'ambiente e ha sottolineato l'importanza della materia (vedere, per esempio, Taskin ed altri c. Turchia, no 46117/99, CEDH 2004-X; Moreno Gómez c. Spagna, no 4143/02, CEDH 2004-X; Fadeïeva c. Russia, no 55723/00, CEDH 2005-IV; Giacomelli c. Italia, no 59909/00, CEDH 2006 -...). La protezione della natura e delle foreste, e più generalmente dell'ambiente, costituisce un valore la cui difesa suscita nell'opinione pubblica, e di conseguenza presso dei poteri pubblici, un interesse consolidato e sostenuto. Degli imperativi economici ed anche certi diritti fondamentali, come il diritto di proprietà, non dovrebbero vedersi accordare il primato di fronte alle considerazioni relative alla protezione dell'ambiente, in particolare quando lo stato ha legiferato in materia (Hamer c. Belgio, no 21861/03, § 79, CEDH 2007 -... (brani)).
88. Prima di pronunciarsi sulla questione di sapere se la restrizione controversa ha rispettato il giusto equilibrio voluto in materia, la Corte tiene a precisare che non potrebbe seguire il Governo quando sostiene che la decisione Ansay c. Turchia (no 49908/99, 2 marzo 2006) è pertinente per l'esame della presente causa. Oltretutto nella causa Ansay, la Corte non disponeva sufficientemente di elementi di fatto e di diritto in quanto agli effetti restrittivi reali della delimitazione sul diritto dei richiedenti di godere del loro bene, essendo la questione principale che doveva definire di sapere se l'annullamento del permesso di costruire degli interessati aveva causato loro un danno di natura tale da rendere questa misura sproporzionata allo scopo legittimo perseguito. La Corte, a buon diritto, ha esaminato questa questione sul terreno della nozione di "regolamentazione dell'uso dei beni" al senso del secondo capoverso dell'articolo 1 del Protocollo no 1 mentre, nello specifico, si tratta di una misura che costituiva la fase iniziale di una privazione di proprietà.
89. Nella presente causa, il richiedente ha acquisito in buona fede nel 1993 il terreno controverso che era, in questo momento, qualificato, senza controversia, come terreno agricolo (paragrafi 8 e 9 sopra) e che era esente da ogni iscrizione restrittiva sul registro fondiario che unicamente faceva fede nel dritto turco (paragrafo 38 sopra). L'acquisizione del terreno da parte del richiedente non era inficiata di nessuna irregolarità suscettibile di essergli dunque contraria; se non fosse stato così, la Direzione generale dei titoli e del catasto non gli avrebbe rilasciato sicuramente il titolo di proprietà stabilita in buona e dovuta forma (paragrafo 9), titolo che fa valere dinnanzi alla Corte adesso.
90. A questo riguardo, la Corte non deve soffermarsi ulteriormente sull'argomento del Governo che fa valere che nella data di acquisizione del terreno, il richiedente avrebbe dovuto essere informato della riqualificazione di questo (paragrafo 80 sopra) in quanto è pacifico che nessun elemento verificabile viene in appoggio a questa asserzione. In compenso, la Corte osserva che al momento, a disprezzo del titolo di proprietà di cui rimane titolare, il richiedente che aveva acquistato un campo agricolo, non può coltivarlo né raccoglierne i frutti né contrarre nessuna transazione su questo terreno. In breve, non ha nessuna possibilità reale di goderne.
91. Pertanto, pure sottolineando che la sua decisione si limita ai fatti dello specifico e non si deve interpretare come una conclusione di principio che notifica che una classificazione come tenuta forestale equivale, a prescindere da tutte le circostanze che restringono la causa, ad un attentato al diritto al rispetto dei beni al senso della prima frase dell'articolo 1 del Protocollo no 1, si è costretti a considerare che la qualifica come tenuta forestale data al terreno controverso ha avuto, nello specifico, per effetto di svuotare di ogni contenuto il diritto di proprietà del richiedente, diritto che era stato acquisito regolarmente nelle condizioni descritte più sopra (paragrafo 9). L'argomento secondo il quale il richiedente sarebbe stato in grado di potere vendere questo terreno ad un terzo fino alla misura preventiva imposta il 28 settembre 2007 (paragrafo 33-34 sopra) non colpisce per niente questa constatazione nella misura in cui, da una parte, questa possibilità di vendita è puramente teorica e, altro parte, essendo stato impegnato un procedimento che prevede l'annullamento del titolo di proprietà ed il suo trasferimento in favore della direzione delle foreste.
92. Resta da determinare se la misura controversa rispetta il giusto equilibrio voluto e, in particolare, se non fa pesare sul richiedente un carico sproporzionato. A questo riguardo, c'è luogo di prendere in considerazione le modalità di indennizzo previste dalla legislazione interna. A questo motivo, la Corte ha appena constatato che non esisteva ricorso interno efficace in materia (paragrafo 74 sopra). Le circostanze della causa, in particolare il carattere definitivo della delimitazione, la mancanza di ogni ricorso interno efficace suscettibile di ovviare alla situazione controversa, l'ostacolo al pieno godimento del diritto di proprietà e la mancanza di indennizzo, portano la Corte a considerare che il richiedente ha dovuto sopportare un carico speciale e derogatorio che ha rotto il giusto equilibro che deve regnare tra, da una parte, le esigenze dell'interesse generale e, dall’altra parte, la salvaguardia del diritto al rispetto dei beni (vedere, mutatis mutandis, Terazzi S.r.l., precitata, § 91). La Corte nota che il Governo non ha invocato nessuna circostanza eccezionale per giustificare la mancanza totale di indennizzo.
93. Quindi, c'è stata violazione dell'articolo 1 del Protocollo no 1.
II. SULLA VIOLAZIONE ADDOTTA DELL'ARTICOLO 6 § 1 DELLA CONVENZIONE
94. Il richiedente si lamenta del difetto di equità e della parzialità delle giurisdizioni nazionali che avrebbero deliberato su degli elementi di prova frammentari. Invoca a questo riguardo l'articolo 6 della Convenzione il cui passaggio pertinente è formulato così:
"1. Ogni persona ha diritto affinché che la sua causa sia equamente sentita da un tribunale che deciderà delle contestazioni sui suoi diritti ed obblighi di carattere civile "
95. Il Governo invita la Corte a dichiarare questa lagnanza inammissibile per difetto di fondamento.
96. Il richiedente sostiene che i tribunali interni si sono basati su delle prove frammentarie per respingere la sua istanza concernente la delimitazione del terreno controverso. Secondo lui, i tribunali avrebbero dovuto esaminare i documenti vecchi ai quali afferma di non avere accesso.
97. Tenuto conto della formulazione della lagnanza, la Corte constata che il richiedente rimette essenzialmente in causa il modo di cui le giurisdizioni nazionali hanno valutato le prove. A questo riguardo, non rileva nessun elemento arbitrario che permetta di stimare che suddette giurisdizioni si sono basate su delle prove frammentarie per decidere della fondatezza della domanda del richiedente. Osserva che la corte d'appello di Çanakkale ha reso il suo giudizio alla luce dei differenti rapporti di perizia così come di altri elementi raccolti in modo obiettivo (paragrafo 22 sopra). La Corte nota inoltre che la Corte di cassazione ha esaminato la lagnanza del richiedente a questo motivo e ha constatato che il tribunale del merito aveva reso il suo giudizio sulla base delle disposizioni pertinenti così come di elementi obiettivi, come il cambiamento del livello sopra lo stesso al terreno controverso, senza avere bisogno di riferirsi a documenti vecchi (paragrafo 24).
98. Ad ogni modo, nella misura in cui il richiedente contesta in sostanza la soluzione adottata dai tribunali nazionali, la Corte ricorda che non gli appartiene di valutare lei stessa gli elementi di fatto che hanno condotto una giurisdizione ad adottare una simile decisione piuttosto che un’altra, e che altrimenti si erigerebbe a giudice di terza o quarta istanza (Kemmache c. Francia (no 3), sentenza del 24 novembre 1994, serie A no 296-C, § 44).
99. Segue che la lagnanza derivata dalla mancanza di equità è manifestamente mal fondata e deve essere respinta in applicazione dell'articolo 35 §§ 3 e 4 della Convenzione.
III. SULL'APPLICAZIONE DELL'ARTICOLO 41 DELLA CONVENZIONE
100. Ai termini dell'articolo 41 della Convenzione,
"Se la Corte dichiara che c'è stata violazione della Convenzione o dei suoi Protocolli, e se il diritto interno dell'Alta Parte contraente permette di cancellare solo imperfettamente le conseguenze di questa violazione, la Corte accorda alla parte lesa, se c'è luogo, una soddisfazione equa. "
101. Per il danno materiale, il richiedente richiede 1 761 230 euro (EUR), o circa 83 EUR/m², per una superficie totale di 21 200 m². A questo riguardo, si basa a titolo comparativo sul valore dei terreni attigui. Porta alla cognizione della Corte due esempi di promesse di acquisto: una riguarda un terreno di 13 762,44 m², per una somma di 4 217 500 EUR; l'altro riguarda un terreno 12 026,56 m², per un importo di 2 078 050 EUR. Senza riferirsi ad un documento preciso in quanto alla superficie del terreno colpito da restrizioni, chiede di essere indennizzato per la totalità del terreno. Sostiene che, anche se solo una parte del terreno, circa 18 000 m², è colpita dalla misura controversa, anche il restante del terreno perde la sua utilità. Peraltro, sollecita per il mancato guadagno un importo di 352 246 EUR.
102. A titolo del danno morale, richiede 10 000 EUR.
103. Il richiedente sollecita 10 000 EUR per la parcella del suo rappresentante, 3 000 EUR per gli oneri e spese e 5 000 EUR per gli oneri di partecipazione all'udienza che ha avuto luogo a Strasburgo.
104. Il Governo invita la Corte a respingere le domande di indennizzo, che giudica eccessiva e prive di fondamento. Stima peraltro che la domanda del richiedente concernente la totalità della superficie del terreno è inaccettabile nella misura in cui la restrizione controversa è parziale. Non si riferisce neanche ad un documento particolare in quanto alla superficie colpita del terreno.
105. Per ciò che riguarda il rimborso degli oneri e spese, il Governo contesta queste pretese, sostenendo che non sono supportate in nessun modo.
106. Nelle circostanze dello specifico, la Corte stima che la domanda dell'applicazione dell'articolo 41 non è matura, cosicché conviene riservarla tenendo conto dell'eventualità di un accordo tra lo stato convenuto ed il richiedente.
PER QUESTI MOTIVI, LA CORTE,
1. Dichiara (all'unanimità) la richiesta ammissibile in quanto alla lagnanza del richiedente derivata da un attentato al diritto al rispetto dei suoi beni, ed inammissibile per il surplus;
2. Stabilisce (per cinque voci contro due) che c'è stata violazione dell'articolo 1 del Protocollo no 1;
3. Stabilisce (per cinque voci contro due) che la questione dell'applicazione dell'articolo 41 della Convenzione non si trova è matura; perciò,
a) la riserva;
b) invita il Governo ed il richiedente ad indirizzarle per iscritto, entro sei mesi a contare dalla data di notificazione della presente sentenza, le loro osservazioni su questa questione, ed in particolare a darle cognizione di ogni accordo al quale potrebbero arrivare;
c) riserva il procedimento ulteriore e delega al presidente della camera la cura di fissarlo all'occorrenza.

Fatto in francese, comunicato poi per iscritto il 15 luglio 2008 in applicazione dell'articolo 77 §§ 2 e 3 dell'ordinamento.
Sally Dollé Francesca Tulkens
Cancelliera Presidentessa
Alla presente sentenza si trova unito, conformemente agli articoli 45 § 2 della Convenzione e 74 § 2 dell'ordinamento, l'esposizione dell'opinione dissidente dei giudici Cabral Barreto e Türmen.
F.T.
S.D.
OPINIONE DISSIDENTE DEI GIUDICI
CABRAL BARRETO E TÜRMEN
Con nostro grande dispiacere, non siamo in grado di seguire l'approccio della maggioranza; per noi, non c'è stata violazione dell'articolo 1 del Protocollo no 1 per le seguente ragioni.
1. Innanzitutto, il richiedente ha acquisito il terreno in causa nel luglio 1993.
È vero che, in quel momento, nessuna menzione era stata inserita nel registro fondiario sull'integrazione dell'appezzamento nella tenuta forestale pubblica; il 20 agosto 1990, la commissione catastale aveva proceduto tuttavia, alla delimitazione della tenuta forestale pubblica, con l'integrazione del terreno in questa tenuta, decisione che è stata resa pubblica.
I paragrafi 71, 86 e 89 della sentenza che fanno riferimento alla "buona fede" del richiedente devono essere letti con una certa riserva: il richiedente aveva la possibilità, se avesse avuto lo zelo necessario in particolare prima di procedere alla sua acquisizione, di conoscere la situazione del terreno in causa, in quanto al punto di sapere se appartenesse o meno alla tenuta forestale.
2. Essenzialmente, bisogna sapere che in dritto turco, ci sono diverse categorie di foreste.
Secondo l'articolo 3 della legge nº 3116 dell’ 8 febbraio 1937, esistevano quattro tipi di foreste: le foreste di stato, le foreste appartenenti alle collettività pubbliche, le foreste delle fondazioni e le foreste private.
Oggi, l'articolo 4 della legge nº 6831 del 31 agosto 1956 contempla tre tipi di foreste: le foreste di stato, le foreste appartenenti a persone giuridiche amministrative e le foreste private.
Le foreste private sono sottoposte all'ispezione ed al controllo dello stato; i loro proprietari hanno un diritto limitato di sfruttamento (paragrafo 53 della sentenza).
Secondo l'articolo 169 della Costituzione, solo la proprietà delle foreste di stato è inalienabile.
La maggioranza non valorizza sufficientemente il fatto che le foreste appartenenti a persone private possono essere trasferite liberamente a terzi (paragrafo 91 della sentenza).
Basta fare attenzione al fatto che, nel procedimento relativo all'annullamento del titolo di proprietà del richiedente ed all'iscrizione del terreno sul registro fondiario a nome del Tesoro pubblico, il ministero delle Foreste ha chiesto delle misure provvisorie per impedire il trasferimento del terreno a terzo (paragrafo 33 della sentenza).
In breve, arriviamo alla conclusione che al momento dell'adozione della sentenza, il richiedente era sempre proprietario di un terreno forestale.
Questo terreno era sottoposto certamente a limitazioni, in particolare per ciò che riguarda la possibilità di costruire o di sfruttarlo in quanto terreno agricolo.
Era però, lecito per il richiedente non solo venderlo a terzi ma anche sfruttarlo in quanto terreno forestale, e questo conformemente al legis artis, procedendo al suo imboschimento o disboscamento in un modo adeguato per esempio.
3. Nelle circostanze dello specifico, non riusciamo a comprendere che la maggioranza si sia allontanata da una giurisprudenza ben conosciuta che ha già lei stessa seguito in altre cause, e che consiste nel dire che le limitazioni al diritto di proprietà possono rivelarsi giustificate e proporzionate quando l'interesse pubblico è in causa.
3.1. La maggioranza esamina la lagnanza del richiedente sotto l'angolo della prima frase dell'articolo 1 del Protocollo no 1 che enuncia il principio del rispetto della proprietà.
Ci sembra che il diritto di proprietà del richiedente sia stato rispettato nello specifico, essendo il richiedente sempre titolare del suo diritto di proprietà.
È vero che il diritto di proprietà ha subito delle restrizioni; ma è anche vero che non è stato svuotato di ogni sostanza come la maggioranza lascio sottintendere in qualche modo quando indica, secondo noi in modo erroneo, che il richiedente non "ha nessuna possibilità reale di goderne" (paragrafo 90 della sentenza).
3.2. Il godimento in causa non differisce per niente dal godimento che era stato esaminato nella causa Ansay c. Turchia (, déc.), no 49908/99, 2 marzo 2006.
Nella causa Ansay, c'era allo stesso modo un acquisto di un terreno in buona fede, terreno per il quale era stato accordato un permesso di costruire.
Tuttavia, questo permesso era stato annullato per il motivo che il terreno si trovava su una tenuta forestale.
In questa causa, i richiedenti adducevano che la decisione di classificare il terreno nella "foresta demaniale", con tutte le limitazioni dell'uso che una simile qualifica provoca, recava offesa al loro diritto di proprietà.
La Corte ha constatato in questa causa che non c’era stato nello specifico né espropriazione formale né espropriazione di fatto; in più, "il fatto che un terreno sia qualificato come "forestale" non porta privazione di proprietà, perché anche dopo questa qualifica, un appezzamento può rimanere privato, in mancanza di procedimento di annullamento del titolo di proprietà."
Nella causa Ansay, la Corte ha precisato che le limitazioni derivanti dalla natura forestale del terreno costituivano un'ingerenza nel godimento dei diritti che i richiedenti traevano dal loro requisito di proprietari e che, quindi, il secondo capoverso dell'articolo 1 del Protocollo no 1 trovava ad applicarsi.
La Corte ha trovato questa ingerenza giustificata avuto riguardo delle preoccupazioni ambientaliste; ora la misura controversa non poteva essere considerata come causa per richiedenti di un danno di natura tale da rendere la misura sproporzionata allo scopo legittimo previsto.
3.3. Un approccio identico è stato seguito dalla nostra sezione nella sua decisione adottata il 26 giugno 2007 nella causa Longobardi ed altri c. Italia (no 7670/03), esaminata anche sotto l'angolo del secondo capoverso dell'articolo 1 del Protocollo no 1.
Un terreno era classificato come edificabile; ma ad un dato momento il ministero del Patrimonio e dell'ambiente lo colpì con un'interdizione assoluta a costruire in ragione dell'interesse archeologico della zona nella quale questo terreno si trovava e tutto ciò senza indennizzo; occorreva nello specifico salvaguardare la visibilità del mausoleo di Santa Elena.
A questo riguardo, la Corte ha osservato che un giusto equilibrio era stato predisposto tra le esigenze dell'interesse generale e gli imperativi di salvaguardia dei diritti fondamentali dell'individuo, e questo malgrado la mancanza di indennizzo.
Nei due casi, i terreni hanno subito allo stesso modo delle limitazioni che hanno ridotto il loro valore economico a quasi niente e hanno portato il loro sfruttamento al minimo possibile; nonostante tutto ciò, nella ponderatezza degli interessi in conflitto, la Corte ha concluso che l'ingerenza era giustificata.
4. E’ così che, nel prolungamento delle decisioni rese nelle cause Luigi Longobardi ed Ansay, prevediamo la soluzione da dare alla nostra causa.
Secondo noi, lo specifico non dipende dal principio di rispetto della proprietà, prima frase del primo capoverso dell'articolo 1 del Protocollo no 1, come sostiene la maggioranza, perché, a dispetto delle limitazioni, il richiedente resta sempre proprietario, ma dipende dalla regolamentazione dell'uso dei beni, enunciati nel secondo capoverso dello stesso articolo.
In più, per noi, i proprietari dei terreni in causa nella causa Ansay e nella presente causa si trovano nella stessa situazione; sono i proprietari di terreni che, ad un dato momento, sono stati classificati come terreni forestali e che devono sfruttare con tutte le limitazioni che una simile classificazione impone tra cui l'interdizione di costruire o di sfruttarli come terreni agricoli.
Secondo una giurisprudenza ben stabilita, il secondo capoverso dell'articolo 1 del Protocollo no 1 si deve leggere alla luce del principio consacrato dalla prima frase dell'articolo; perciò, una misura di ingerenza deve predisporre un "giusto equilibro" tra gli imperativi dell'interesse generale e quelli della salvaguardia dei diritti fondamentali dell'individuo.
Deve esistere un rapporto ragionevole di proporzionalità tra i mezzi impiegati e lo scopo previsto.
Dunque, la questione principale da decidere è quella di sapere se il giusto equilibrio che deve regnare tra le esigenze dell'interesse generale della comunità e gli imperativi della salvaguardia dei diritti individuali è stato rotto in ragione delle limitazioni al diritto di proprietà del richiedente.
Controllando il rispetto di questa esigenza, la Corte riconosce allo stato un grande margine di valutazione tanto per scegliere le modalità di collocamento in opera che per giudicare se le loro conseguenze si trovano legittimate, nell'interesse generale, dalla preoccupazione di raggiungere l'obiettivo della legge in causa (Chassagnou ed altri c. Francia [GC], nostri 25088/94, 28331/95 e 28443/95, § 75, CEDH 1999-III).
Trattandosi di campi come quello dell'ambiente, la Corte rispetta a questo riguardo la valutazione portata dal legislatore nazionale, salvo nel caso in cui sia priva manifestamente di base ragionevole (vedere, mutatis mutandis, Immobiliare Saffi c. Italia [GC], no 22774/93, § 49, CEDH 1999-V).
Concernente la presente causa, constatiamo che la qualifica di zona forestale data al terreno del richiedente deriva dai piani del catasto e della conferma della Direzione generale delle foreste nel 1990; questa qualifica, contestata dall'interessato, è stata approvata nel 2000 da un giudizio della corte d'appello di Çanakkale che, in seguito ad un esame approfondito di tutti gli aspetti del problema, ha interinato la qualifica di dominio forestale data al terreno.
Niente nella pratica dà a pensare che questa qualifica sia stata arbitraria o imprevedibile.
Dunque, l'ingerenza controversa risponde alla condizione di legalità.
Inoltre, lo scopo delle limitazioni imposte al richiedente, ossia la protezione della natura e delle foreste, rientra nella cornice dell'interesse generale nel senso del secondo capoverso dell'articolo 1 del Protocollo no 1.
In quanto all'esigenza di proporzionalità tra le ingerenze nel diritto di proprietà del richiedente e lo scopo di interesse generale perseguito, bisogna sottolineare che la Corte ha detto a più riprese che, avuto riguardo delle preoccupazioni ambientaliste, molto presenti oggigiorno, "la misura controversa non può essere considerata come causante [al richiedente] un danno di natura tale da rendere questa misura sproporzionata rispetto allo scopo legittimo previsto"( Kapsalis e Nima-Kapsali c. Grecia, déc.), no 20937/03, 23 settembre 2004).
In conclusione, e malgrado la mancanza di indennizzo, consideriamo che un giusto equilibrio tra le esigenze dell'interesse generale e gli imperativi di salvaguardia dei diritti fondamentali dell'individuo sia stato osservato nello specifico.

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A.N.P.T.ES.
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