TROISIÈME SECTION
AFFAIRE CARAGHEORGHE ET AUTRES c. ROUMANIE
(Requête no 38742/04)
ARRÊT
STRASBOURG
19 janvier 2010
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l'article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l'affaire Caragheorghe et autres c. Roumanie,
La Cour européenne des droits de l'homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :
Josep Casadevall, président,
Elisabet Fura,
Corneliu Bîrsan,
Boštjan M. Zupan�i�,
Alvina Gyulumyan,
Luis López Guerra,
Ann Power, juges,
et de Santiago Quesada, greffier de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 15 décembre 2009,
Rend l'arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1. A l'origine de l'affaire se trouve une requête (no 38742/04) dirigée contre la Roumanie et dont cinq ressortissants de cet État, OMISSIS (« les requérants »), ont saisi la Cour le 24 juillet 2004, en vertu de l'article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).
2. Le gouvernement roumain (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. Răzvan-Horaţiu Radu, du ministère des Affaires étrangères.
3. Le 2 mars 2006, le président de la troisième section a décidé de communiquer la requête au Gouvernement. Comme le permet l'article 29 § 3 de la Convention, il a en outre été décidé que seraient examinés en même temps la recevabilité et le fond de l'affaire.
EN FAIT
I. LES CIRCONSTANCES DE L'ESPÈCE
4. Les requérants initiaux sont nés respectivement en 1921, 1920, 1923, 1948 et 1920 et résident à Bucarest. A la suite du décès de Mme L. T., survenu le 11 août 2005, ses héritiers, M. N. D. T. et Mme V. T., ont exprimé, par une lettre du 19 avril 2007, le souhait de continuer l'instance. A la suite du décès de Mme Virginia C., survenu le 8 mars 2006, ses héritiers, M. N. C. C. et Mme D. M. D., ont exprimé, par des lettres des 1er septembre 2006 et 19 avril 2007, le souhait de continuer l'instance.
5. En 1950, l'immeuble sis à Bucarest, au no 14, rue Aviator Popişteanu, composé d'une maison et du terrain afférent, ayant appartenu à G.I., l'époux de la requérante L. T., et respectivement l'oncle des autres requérants, fit l'objet d'une nationalisation.
6. Après le décès de G.I., le 14 avril 1983, ses héritiers étaient L. T., avec un quota de 1/2 de la masse successorale, D. I. G. C., avec un quota de 4/24, V. C., E. P. et P.G. avec un quota commun de 4/24, et trois autres personnes avec un quota commun de 4/24.
7. Le 20 juin 1996, les requérants obtinrent une décision définitive constatant l'illégalité de la nationalisation et leur droit de propriété sur l'immeuble.
8. Le 17 novembre 1997, en application de la décision susmentionnée, la mairie de Bucarest ordonna la restitution de l'immeuble aux requérants à l'exception de plusieurs appartements vendus, en vertu de la loi no 112/1995, aux locataires qui les occupaient. Un procès-verbal fut dressé à cette occasion.
9. Le 3 décembre 1997, les requérants demandèrent aux tribunaux de constater la nullité de la vente de l'appartement no 2 de 38,01 m² et le terrain afférent de 14,19 m², de l'appartement no 5 de 48,42 m² et le terrain afférent de 18,02 m², et l'appartement no 4, sans dimensions connues, de l'immeuble susmentionné, qui avaient été vendus par l'État en février 1997. Ils faisaient valoir que l'État s'était emparé de ces appartements de manière abusive et illégale, et qu'il ne pouvait pas être leur propriétaire légitime et, par conséquent, ne pouvait légalement les vendre. Par un jugement définitif du 25 janvier 1999, le tribunal de première instance de Bucarest, tout en reconnaissant le droit de propriété des requérants, rejeta leur action, au motif que les locataires étaient des acquéreurs de bonne foi. Le tribunal n'octroya aucune indemnisation aux requérants.
10. Par un arrêt définitif du 21 octobre 2003, la cour d'appel de Bucarest rejeta une nouvelle action des requérants en annulation du contrat de vente de l'appartement no 2, en retenant qu'elle se heurtait à l'autorité de chose jugée du jugement du 25 janvier 1999.
11. Par des arrêts définitifs des 19 novembre 2003 et 23 janvier 2004, la cour d'appel de Bucarest et la Haute Cour de cassation et de justice rejetèrent deux nouvelles actions des requérants en annulation du contrat de vente de l'appartement no 5, en retenant qu'elles se heurtaient à l'autorité de chose jugée du jugement du 25 janvier 1999.
12. Le 26 juillet 2001, sur le fondement de la loi no 10/2001, les requérants déposèrent auprès de la mairie de Bucarest une demande de restitution des appartements nos 2, 4 et 5. Aucune décision n'a été rendue à ce jour.
II. LE DROIT INTERNE PERTINENT
13. Les dispositions légales et la jurisprudence interne pertinentes sont décrites dans les arrêts Străin et autres c. Roumanie (no 57001/00, CEDH 2005-VII, §§ 19-26), Păduraru c. Roumanie (no 63252/00, §§ 38-53, 1er décembre 2005) et Tudor c. Roumanie (no 29035/05, §§ 15–20, 17 janvier 2008).
EN DROIT
I. QUESTION PRÉLIMINAIRE SUR LA QUALITÉ DE VICTIME
14. La Cour note que suite au décès de Mme L. T., survenu le 11 août 2005, ses héritiers, M. N. D. T. et Mme V. T., ont exprimé, par une lettre du 19 avril 2007, le souhait de continuer l'instance. A la suite du décès de Mme V. C., survenu le 8 mars 2006, ses héritiers, M. N. C. C. et Mme D. M. D., ont exprimé, par des lettres du 1er septembre 2006 et 19 avril 2007, le souhait de continuer l'instance.
15. La Cour estime, eu égard à l'objet de la présente affaire et à l'ensemble des éléments qui sont en sa possession, que les héritiers des deux requérantes peuvent prétendre avoir un intérêt suffisant pour justifier de la poursuite de l'examen de la requête et leur reconnaît dès lors la qualité pour se substituer désormais à elles dans la présente affaire (voir Hodoş et autres c. Roumanie, no 29968/96, § 43, 21 mai 2002).
16. Pour des raisons d'ordre pratique, le présent arrêt continuera d'appeler Mmes L. T. et V. C. comme faisant partie des « requérants » bien qu'il faille aujourd'hui attribuer cette qualité à leurs héritiers (voir Dalban c. Roumanie [GC], no 28114/95, § 1, CEDH 1999-VI).
II. QUESTION PRÉLIMINAIRE SUR L'OBJET DE LA REQUÊTE
17. La Cour note que dans les deux formulaires de requête transmis le 24 juillet 2004, les requérants présentent, séparément, la situation juridique des appartements nos 2 et 5 de l'immeuble sis à Bucarest, au no 14, rue Aviator Popisteanu, dont ils réclament la restitution.
18. Dans une lettre du 19 avril 2007, les requérants réclament la restitution des appartements vendus par l'État de l'immeuble précité.
19. Dans une lettre du 1er juin 2007, contenant les observations du Gouvernement sur les demandes de satisfaction équitable des requérants, le Gouvernement estime que l'objet de la présente requête, tel qu'il ressort des formulaires de requête est constitué par les appartements nos 2 et 5 de l'immeuble précité.
20. Dans leurs observations supplémentaires envoyées à la Cour le 27 janvier 2008, les requérants se bornent à réclamer la valeur vénale des appartements nos 2 et 5, telle qu'elle ressort d'un rapport d'expertise produit par le Gouvernement.
21. Compte tenu de ce qui précède, la Cour conclut que l'objet de la présente requête vise les appartements nos 2 et 5 de l'immeuble sis à Bucarest, au no 14, rue Aviator Popişteanu.
III. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L'ARTICLE 1 DU PROTOCOLE No 1
22. Les requérants allèguent une atteinte à leur droit au respect de leurs biens en raison de l'impossibilité de jouir des appartements nos 2 et 5 et du terrain afférent de l'immeuble sis à Bucarest, au no 14, rue Aviator Popişteanu, dont ils ont été reconnus comme propriétaires par la décision définitive du 20 juin 1996, impossibilité découlant de la vente de ces biens par l'État aux locataires qui les occupaient. Ils invoquent l'article 1 du Protocole no 1, ainsi libellé :
« Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.
Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les États de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. »
23. Le Gouvernement s'oppose à cette thèse.
A. Sur la recevabilité
24. Le Gouvernement fait valoir que le grief doit être rejeté pour non-respect du délai de six mois dans la mesure où la requête a été introduite le 27 août 2004, date de la réception des formulaires de requête à la Cour, alors que les dernières décisions internes définitives au sens de l'article 35 § 1 de la Convention ont été prononcées les 21 octobre et 19 novembre 2003 par la cour d'appel de Bucarest.
25. Les requérants n'ont pas soumis d'observations sur ce point.
26. La Cour rappelle qu'aux termes de l'article 35 § 1 de la Convention, elle ne peut être saisie qu'après l'épuisement des voies de recours internes et dans un délai de six mois à partir de la date de la décision interne définitive. Lorsque la violation alléguée consiste en une situation continue, le délai de six mois ne commence à courir qu'à partir du moment où cette situation continue prend fin (voir, mutatis mutandis, Hornsby c. Grèce, arrêt du 19 mars 1997, Recueil des arrêts et décisions 1997-II, p. 508, § 35 et Marinakos c. Grèce, (déc.) no 49282/99, 29 mars 2000).
27. La Cour estime que l'impossibilité alléguée par les requérants de jouir, depuis plusieurs années, de leur droit de propriété reconnu par une décision définitive et irrévocable s'analyse en une situation continue. Le simple fait qu'ils ont tenté – sans succès – d'y mettre un terme en demandant, par la voie d'une action en justice, l'annulation des contrats de vente conclus par l'État avec les locataires (voir paragraphes 9-11 ci-dessus) ou, par la voie d'une demande administrative, l'obtention de dédommagements (voir paragraphe 12 ci-dessus), ne saurait changer ce constat factuel. A ce jour, les requérants ne se sont pas vu restituer les biens litigieux et n'ont pas davantage reçu d'indemnité à hauteur de leur valeur marchande. Le délai de six mois prévu à l'article 35 § 1 de la Convention n'a donc pas commencé à courir en l'espèce (voir Todicescu c. Roumanie, no 18419/02, § 16, 24 mai 2007, et Horia Jean Ionescu c. Roumanie, no 11116/02, § 24, 31 mai 2007).
28. Partant, l'exception du Gouvernement ne saurait être accueillie favorablement. La Cour constate également que ce grief n'est pas manifestement mal fondé au sens de l'article 35 § 3 de la Convention. Elle relève par ailleurs que celui-ci ne se heurte à aucun autre motif d'irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.
B. Sur le fond
29. Le Gouvernement réitère ses arguments présentés précédemment dans des affaires similaires, soutenant que l'ingérence dans le droit des requérants au respect de leurs biens est proportionnée, vu qu'ils ont la possibilité de se voir octroyer des dédommagements selon la procédure prévue par les lois nos 10/2001 et 247/2005.
30. Les requérants insistent sur l'atteinte à leur droit de propriété.
31. La Cour a déjà affirmé dans de nombreuses affaires que la mise en échec du droit de propriété des requérants sur leurs biens vendus par l'État aux tiers qui les occupaient en tant que locataires, combinée avec l'absence d'indemnisation à hauteur de la valeur des biens est incompatible avec le droit au respect de leurs biens garanti par l'article 1 du Protocole no 1 (Străin précité, §§ 39, 43 et 59 ; Porteanu c. Roumanie, no 4596/03, § 35, 16 février 2006).
32. En l'espèce, la Cour n'aperçoit pas de raisons de s'écarter de son approche dans les affaires précitées. Elle observe d'abord que, par une décision définitive 20 juin 1996, a été établi le caractère illégal de la nationalisation de l'immeuble sis à Bucarest, au no 14, rue Aviator Popişteanu. La vente par l'État des appartements nos 2 et 5 et du terrain afférent, appartenant aux requérants, empêche, aujourd'hui encore, ceux-ci de jouir de leur droit de propriété reconnu par une décision définitive. La Cour considère qu'une telle situation équivaut à une privation de propriété de facto, en l'absence de toute indemnisation.
33. La Cour rappelle qu'à l'époque des faits il n'y avait pas en droit interne de voie de recours efficace susceptible d'offrir aux requérants une indemnisation pour cette privation (Străin, précité, §§ 23, 26–27, 55-56; Porteanu, précité, §§ 23–24 et 34–35). De surcroît, elle observe qu'à ce jour, le Gouvernement n'a pas démontré que le système d'indemnisation mis en place par la loi no 247/2005 permettrait aux bénéficiaires de cette loi de toucher, selon une procédure et un calendrier prévisibles, une indemnité en rapport avec la valeur vénale des biens dont ils ont été privés.
34. Partant, il y a violation de l'article 1 du Protocole no 1.
IV. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L'ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION
35. Les requérants se plaignent de ce que les autorités n'ont pas exécuté la décision définitive du 20 juin 1996 confirmant leur droit de propriété sur les bien litigieux. Ils invoquent l'article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé dans ses parties pertinentes :
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »
36. Le Gouvernement s'oppose à cette thèse.
A. Sur la recevabilité
37. La Cour constate que le grief n'est pas manifestement mal fondé au sens de l'article 35 § 3 de la Convention. Elle relève par ailleurs qu'il ne se heurte à aucun autre motif d'irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.
B. Sur le fond
38. La Cour considère, compte tenu de ses conclusions figurant aux paragraphes 29-34 ci-dessus, qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le fond de ce grief (voir, entre autres, Enciu et Lega c. Roumanie, no 9292/05, § 36, 8 février 2007, et Ciobotea c. Roumanie, no 31603/03, § 39, 25 octobre 2007).
V. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L'ARTICLE 8 DE LA CONVENTION
39. Les requérants se plaignent, sans étayer leur grief, de la méconnaissance de l'article 8 de la Convention à raison de l'impossibilité de jouir des biens dont ils étaient les propriétaires.
40. Compte tenu de l'ensemble des éléments en sa possession, et dans la mesure où elle est compétente pour connaître des allégations formulées, la Cour n'a relevé aucune apparence de violation des droits et libertés garantis par la Convention ou ses Protocoles.
41. Il s'ensuit que cette partie de la requête est manifestement mal fondée et doit être rejetée en application de l'article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.
VI. SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
42. Aux termes de l'article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu'il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d'effacer qu'imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s'il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A. Dommage
43. Les requérants réclament, au titre de dommage matériel, la restitution des appartements nos 2 et 5 et du terrain afférent de l'immeuble sis à Bucarest, au no 14, rue Aviator Popisteanu, qui ont été vendus par l'État en février 1997. Ils réclament également l'octroi d'une somme au titre de dommage moral qu'ils ne quantifient pas.
44. Le Gouvernement fait valoir que la valeur marchande des biens en cause est de 159 147 EUR, et il soumet un rapport d'expertise en ce sens. S'agissant du dommage moral, le Gouvernement estime qu'il serait suffisamment compensé par un constat de violation. A titre subsidiaire, il renvoie aux sommes accordées par la Cour dans des affaires similaires.
45. La Cour rappelle qu'elle a conclu à la violation de l'article 1 du Protocole no 1 à la Convention en raison de la vente par l'État des biens des requérants, combinée avec l'absence totale d'indemnisation.
46. La Cour relève qu'il ressort du dossier que les requérants étaient copropriétaires des appartements, pour un quota commun de 5/6 (voir le paragraphe 6 ci-dessus). Dans la mesure où il ne ressort pas des documents et informations fournis par les parties que les requérants ont partagé les appartements en cause, la Cour ne saurait ordonner au Gouvernement de restituer aux requérants tout ou partie des appartements précités (voir, dans le même sens, Nistorescu c. Roumanie, no 15517/03, § 24, 17 juin 2008).
47. Compte tenu des informations dont elle dispose sur les prix du marché immobilier local et statuant en équité, la Cour estime la valeur marchande actuelle de la part des requérants dans les appartements litigieux à 133 000 EUR.
48. La Cour considère que les événements en cause ont pu provoquer aux requérants un état d'incertitude qui ne peut pas être compensé par le constat de violation. Elle estime que la somme de 2 000 EUR représente une réparation équitable du préjudice moral subi par les requérants.
B. Frais et dépens
49. Les requérants n'ont formulé aucune demande à ce titre.
C. Intérêts moratoires
50. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d'intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L'UNANIMITÉ,
1. Déclare la requête recevable quant aux griefs tirés des articles 1 du Protocole no 1 et 6 § 1 de la Convention et irrecevable pour le surplus ;
2. Dit qu'il y a eu violation de l'article 1 du Protocole no 1 ;
3. Dit qu'il n'y a pas lieu d'examiner au fond le grief tiré de l'article 6 § 1 de la Convention ;
4. Dit
a) que l'État défendeur doit verser aux requérants, conjointement, dans les trois mois à compter du jour où l'arrêt sera devenu définitif conformément à l'article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes :
i. 133 000 EUR (cent trente-trois mille euros) pour dommage matériel ;
ii. 2 000 EUR (deux mille euros) pour préjudice moral ;
iii. tout montant pouvant être dû à titre d'impôt sur lesdites sommes ;
b) que les sommes en question seront à convertir dans la monnaie de l'Etat défendeur au taux applicable à la date du règlement ;
c) qu'à compter de l'expiration dudit délai et jusqu'au versement, ces montants seront à majorer d'un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage.
5. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 19 janvier 2010, en application de l'article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Santiago Quesada Josep Casadevall
Greffier Président