Conclusion Dommage mat?riel – r?paration p?cuniaire ; Pr?judice moral – r?paration p?cuniaire ; Remboursement partiel frais et d?pens – proc?dure nationale ; Remboursement partiel frais et d?pens – proc?dure de la Convention
ANCIENNE DEUXI?ME SECTION
AFFAIRE CARBONARA ET VENTURA c. ITALIE
(Requ?te no 24638/94)
ARR?T
(Satisfaction ?quitable)
STRASBOURG
Strasbourg, le 11 d?cembre 2003
Cet arr?t est d?finitif. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Carbonara et Ventura c. Italie,
La Cour europ?enne des Droits de l’Homme (ancienne deuxi?me section), si?geant en une chambre compos?e de :
MM. A. B. Baka, pr?sident,
L. Ferrari Bravo,
G. Bonello,
Mme V. Str??nick?,
MM. P. Lorenzen,
Mme M.Tzatza-Nikolovska,
E. Levits, juges,
et de M. S. Nielsen, greffier adjoint,
Apr?s en avoir d?lib?r? en chambre du conseil le 20 novembre 2003,
Rend l’arr?t que voici, adopt? ? cette date :
PROC?DURE
1. L’affaire a ?t? d?f?r?e ? la Cour, conform?ment aux dispositions qui s’appliquaient avant l’entr?e en vigueur du Protocole no 11 ? la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libert?s fondamentales (? la Convention ?), par la Commission europ?enne des Droits de l’Homme (? la Commission ?), le 3 novembre 1998, et par Mme E. C., MM. P. C., A. C. et C. V. (? les requ?rants ?), le 4 novembre 1998. Le 29 janvier 1999, soit au-del? du d?lai de trois mois pr?vu par les anciens articles 32 ? 1 et 47 de la Convention, le gouvernement italien (? le Gouvernement ?) a adress? ? la Cour une lettre de saisine.
2. A l’origine de l’affaire se trouve une requ?te (no 24638/94) dirig?e contre la R?publique italienne et dont quatre ressortissants de cet Etat avaient saisi la Commission le 25 mai 1994, en vertu de l’ancien article 25 de la Convention. Les requ?rants all?guaient une atteinte injustifi?e ? leur droit au respect de leurs biens. La Commission (premi?re chambre) a d?clar? la requ?te recevable le 22 octobre 1997. Dans son rapport du 1erjuillet 1998 (ancien article 31 de la Convention), elle a formul? l’avis unanime qu’il y a eu violation de l’article 1 du Protocole no 1.
3. Par un arr?t du 30 mai 2000 (? l’arr?t au principal ?), la Cour a jug? que les requ?rants avaient ?t? victimes d’une privation arbitraire de leur terrain et que partant, il y avait eu violation de l’article 1 du Protocole no 1 (CEDH 2000-VI, ?? 72-73, et point 2 du dispositif).
4. En s’appuyant sur l’article 41 de la Convention, les requ?rants r?clamaient au titre du dommage mat?riel une satisfaction ?quitable de 364 790 000 lires italiennes (ITL) – correspondant ? la valeur du terrain au moment de l’occupation – somme devant ?tre index?e et major?e d’int?r?ts. Au titre du dommage moral, les requ?rants demandaient 100 000 000 ITL chacun. Ils revendiquaient enfin le remboursement des frais de justice devant les juridictions nationales ? hauteur de 163 896 627 ITL et le remboursement des frais encourus dans la proc?dure ? Strasbourg ? hauteur de 124 783 114 ITL.
5. La question de l’application de l’article 41 de la Convention ne se trouvant pas en ?tat, la Cour l’a r?serv?e et a invit? le Gouvernement et les requ?rants ? lui soumettre par ?crit, dans les trois mois, leurs observations sur ladite question et notamment ? lui donner connaissance de tout accord auquel ils pourraient aboutir (ibidem, ? 79 et point 3 du dispositif).
6. Le d?lai initialement fix? au 30 ao?t 2000 pour permettre aux parties de rechercher un accord amiable a ?t? prorog?, ? la demande de celles-ci, au 30 novembre 2000, puis encore au 30 mai 2001, et il est ?chu sans que les parties ne parviennent ? un accord.
7. R?unie le 15 novembre 2001 sur l’initiative de son Pr?sident (point 3 c) du dispositif de l’arr?t au principal), la Chambre a estim? opportun d’effectuer une expertise et a d?cid? que la t?che de l’expert consisterait ? d?terminer, d’une part, la valeur du terrain au moment de l’occupation, la valeur actuelle du terrain et la plus-value apport?e par l’existence de b?timents ; d’autre part, le dommage d?coulant de la non-jouissance du terrain et le co?t de construction des b?timents ; enfin, les frais de remise en l’?tat pour le cas o? le terrain serait restitu? aux requ?rants.
8. Par un courrier du 15 novembre 2001, la Cour a communiqu? cette d?cision aux parties et a invit? celles-ci ? lui fournir le nom d’un expert choisi d’un commun accord. La Cour a par ailleurs pr?cis? que la charge des frais et honoraires d’expertise p?serait sur le Gouvernement (article 38 de la Convention).
9. Par lettres des 18 et 19 mars 2002, les requ?rants et le Gouvernement respectivement ont inform? la Cour que, d’un commun accord, ils avaient choisi M. A. T..
10. Sur instructions de la Cour, le 28 mai 2002 le greffe a adress? un mandat ? M. A. T.avec copie aux parties.
Le texte du mandat se lit ainsi :
Monsieur,
J’ai l’honneur de vous informer que la Cour europ?enne des Droits de l’Homme a d?cid? de vous donner mandat, conform?ment aux indications des parties, afin d’expertiser un terrain ayant appartenu aux requ?rants.
Conform?ment ? la d?cision adopt?e par la Chambre charg?e d’examiner la requ?te, votre t?che consistera ? d?terminer :
– d’une part, la valeur du terrain au moment de l’occupation, la valeur actuelle du terrain et la plus-value apport?e par l’existence de b?timents ;
– d’autre part, le dommage d?coulant de la non-jouissance du terrain et le co?t de construction des b?timents ;
– enfin, les frais de remise en l’?tat pour le cas o? le terrain serait restitu? aux requ?rants.
J’ai l’honneur de vous informer que la charge finale des frais de l’expertise et de vos honoraires p?sera sur l’Etat (article 38 de la Convention).
11. L’expert a accept? le mandat en date du 20 juin 2002.
12. Par un courrier du 3 juillet 2002, le greffe en a inform? les parties en les invitant ? prendre les mesures n?cessaires pour que l’expert puisse accomplir sa t?che.
13. Le 5 d?cembre 2002, l’expert a d?pos? son rapport avec annexes ainsi que sa demande relative ? ses frais et honoraires.
14. Le Gouvernement et les requ?rants ont pr?sent? leurs observations sur l’expertise. Celles-ci ont ?t? consult?es par les parties, qui ont ensuite d?pos? des commentaires.
15. Le 1er novembre 2001, la Cour avait entre-temps modifi? la composition de ses sections (article 25 ? 1 du r?glement). La pr?sente requ?te a cependant continu? ? ?tre examin?e par la chambre de l’ancienne section II telle qu’elle existait avant cette date.
EN DROIT
16. Aux termes de l’article 41 de la Convention,
? Si la Cour d?clare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les cons?quences de cette violation, la Cour accorde ? la partie l?s?e, s’il y a lieu, une satisfaction ?quitable. ?
I. Validit? de l’expertise
17. Les parties n’ont pas contest? la validit? de l’expertise.
18. La Cour tient pour valide le rapport de l’expert et le prend en consid?ration pour rendre sa d?cision.
II. Dommage
A. Dommage mat?riel
1. R?sum? de l’expertise et des conclusions de l’expert
19. Long de vingt-quatre pages et comportant plusieurs annexes, le rapport d’expertise contient une estimation de la valeur du terrain litigieux au 30 juillet 1970, au moment de l’occupation, et en 2002, lorsque l’expertise a ?t? effectu?e. Ensuite figure l’estimation du b?timent construit par l’administration communale depuis l’occupation du terrain et qui est en partie situ? sur le terrain des requ?rants.
L’estimation de l’expert porte sur une ?tendue de 2 649 m?tres carr?s, figurant au cadastre de la ville de Noicattaro ? la parcelle 590, feuille 34.
Pour r?diger son rapport, l’expert s’est fond? sur des documents fournis par la ville de Noicattaro, sur des ?l?ments apport?s par les requ?rants ainsi que sur des renseignements provenant du march? immobilier. Il a en outre tenu compte de l’?volution du taux d’inflation et des prix dans la p?riode concern?e.
20. L’expert a constat? qu’en 1970, au moment de l’occupation du terrain, la ville de Noicattaro n’avait pas de plan d’urbanisme g?n?ral mais uniquement un r?glement de construction (regolamento edilizio) dat? du 9 mars 1928. Ledit r?glement n’affectait pas le terrain litigieux ? un usage sp?cifique. Il se bornait ? fixer la hauteur maximale des b?timents, identique pour les constructions priv?es et publiques.
Pour savoir si ? l’?poque le terrain ?tait constructible, il aurait fallu examiner si la zone dans laquelle il est situ? ?tait urbanisable, ? savoir si elle pr?tait de par sa nature et par sa situation ? un d?veloppement urbain. L’expert r?pond affirmativement sur ce point et indique que ceci est confirm? par sa viabilit? (existence d’?gouts, eau, ?lectricit?).
21. L’expert en d?duit que le terrain des requ?rants en 1970 ?tait potentiellement constructible. La constructibilit? du terrain est par ailleurs confirm?e par le choix des autorit?s d’y construire une ?cole.
22. Pour d?terminer la valeur du terrain en 1970, au moment de son occupation, l’expert a pris en compte deux contrats de vente concernant deux parcelles de terrains limitrophes, r?guli?rement enregistr?s au cadastre, et en a calcul? le prix moyen.
L’expert conclut qu’en 1970, la valeur du terrain ?tait de 13 842, 38 EUR.
23. Cette somme actualis?e au mois d’ao?t 2002, selon le taux d’inflation en Italie dans la p?riode concern?e, est de 200 449 EUR [suivant le coefficient de r??valuation de l’ISTAT publi? dans ? Consulente Immobiliare ?].
24. Pour d?terminer la valeur du terrain en 2002, l’expert a pris en compte, d’une part, le plan d’urbanisme adopt? post?rieurement ? 1970 et le fait que celui-ci a permis un volume d’occupation des sols (indice di fabbricabilit?) de 3 m?tres cubes par m?tre carr?. D’autre part, l’expert a pris en compte deux contrats de vente et une donation de trois terrains limitrophes, dat?s respectivement de 2001, 1998 et 1999, et a calcul? le prix moyen pour ces trois terrains.
L’expert a conclu que la valeur du terrain en 2002 ?tait de 62,15 EUR par m?tre carr?, soit une somme de 493 906,05 EUR.
25. L’expert s’est ensuite pench? sur la plus-value apport?e au terrain par l’existence de parties d’un b?timent, ? savoir une ?cole.
Etant donn? l’inexistence d’un march? immobilier de b?timents affect?s ? usage scolaire, l’expert a indiqu? que la valeur du b?timent correspond dans ce cas au co?t de construction de celui-ci, d?duction faite de 20 % pour cause de v?tust? de l’immeuble.
Ainsi, la plus-value du terrain apport?e par l’existence du b?timent sur celui-ci est de 891 488, 55 EUR.
26. Quant au pr?judice d?coulant de la non-jouissance du terrain, l’expert l’a ?valu? ? 192 342, 65 EUR, sur la base de la valeur du terrain en 1970 ; et ? 253 874, 21 EUR, sur base de la valeur moyenne du terrain pendant la p?riode concern?e.
27. Enfin, quant ? la question de savoir ? quel prix le terrain pourrait ?tre remis en l’?tat en cas de restitution, l’expert a indiqu? que cette op?ration reviendrait ? 48 442, 39 EUR. Il a ajout? que la restitution du terrain s’av?re tr?s on?reuse pour l’administration puisque l’?cole est seulement en partie situ?e sur le terrain litigieux.
28. Pour r?sumer les conclusions de l’expert :
valeur du terrain en 1970 actualis?e :
200 449 EUR
valeur du terrain en 2002 :
493 906,05 EUR
plus-value apport?e par le b?timent = co?t de construction :
891 488, 55 EUR
non-jouissance du terrain :
A. 192 342, 65 EUR.
B. 253 874, 21 EUR
2. Arguments du Gouvernement
29. Le Gouvernement fait en premier lieu observer que la restitution du terrain est improbable vu que celle-ci entra?nerait la d?molition partielle de l’?cole construite sur le terrain.
30. Le Gouvernement conteste ensuite l’?valuation du terrain en 1970 et soutient que celui-ci ?tait agricole. De ce fait, au lieu de 10 118 ITL par m?tre carr? estim?s par l’expert, le terrain aurait valu ? l’?poque 5 267, 16 ITL par m?tre carr?.
31. Le Gouvernement conteste ?galement l’?valuation du terrain en 2002, et soutient que la valeur de celui-ci est tout au plus de 49 244, 91 EUR.
32. Enfin, le Gouvernement soutient qu’aucune somme pour la non-jouissance du terrain n’est due aux requ?rants, ?tant donn? que, selon la jurisprudence de la Cour, la valeur du terrain ? indemniser est calcul?e ? aujourd’hui.
3. Arguments des requ?rants
33. Les requ?rants font observer que l’expert a sous-estim? le potentiel constructible du terrain, au motif qu’il s’est bas? sur le volume d’occupation du sol ?tabli par le plan d’urbanisme adopt? apr?s l’occupation du terrain.
Ils soutiennent que, d’apr?s le r?glement en vigueur au moment de l’occupation du terrain, ce dernier aurait pu ?tre construit pour un volume beaucoup plus important, ce qui aurait donn? une valeur plus de trois fois sup?rieure ? celle d?termin?e par l’expert.
4. D?cision de la Cour
34. La Cour rappelle qu’un arr?t constatant une violation entra?ne pour l’Etat d?fendeur l’obligation juridique de mettre un terme ? la violation et d’en effacer les cons?quences de mani?re ? r?tablir autant que faire se peut la situation ant?rieure ? celle-ci (Iatridis c. Gr?ce (satisfaction ?quitable) [GC], no 31107/96, ? 32, CEDH 2000-XI).
35. Les Etats contractants parties ? une affaire sont en principe libres de choisir les moyens dont ils useront pour se conformer ? un arr?t constatant une violation. Ce pouvoir d’appr?ciation quant aux modalit?s d’ex?cution d’un arr?t traduit la libert? de choix dont est assortie l’obligation primordiale impos?e par la Convention aux Etats contractants : assurer le respect des droits et libert?s garantis (article 1). Si la nature de la violation permet une restitutio in integrum, il incombe ? l’Etat d?fendeur de la r?aliser, la Cour n’ayant ni la comp?tence ni la possibilit? pratique de l’accomplir elle-m?me. Si, en revanche, le droit national ne permet pas ou ne permet qu’imparfaitement d’effacer les cons?quences de la violation, l’article 41 habilite la Cour ? accorder, s’il y a lieu, ? la partie l?s?e la satisfaction qui lui semble appropri?e (Brumarescu c. Roumanie (satisfaction ?quitable) [GC], no 28342/95, ? 20, CEDH 2000-I).
36. Dans son arr?t au principal, la Cour a dit que l’ing?rence litigieuse ne satisfaisait pas ? la condition de l?galit? et ?tait arbitraire (paragraphes 72 et 73 de l’arr?t au principal). L’acte du gouvernement italien que la Cour a tenu pour contraire ? la Convention n’?tait pas une expropriation qui e?t ?t? l?gitime si une indemnisation avait ?t? vers?e, mais une mainmise ill?gale sur les biens des requ?rants.
37. Le caract?re illicite de pareille d?possession se r?percute par la force des choses sur les crit?res ? employer pour d?terminer la r?paration due par l’Etat d?fendeur, les cons?quences financi?res d’une mainmise licite ne pouvant ?tre assimil?es ? celles d’une d?possession illicite (Ex Roi de Gr?ce et autres c. Gr?ce, [GC], no 25701/94, ? 75, CEDH 2002).
38. La Cour a adopt? une position tr?s semblable dans l’affaire Papamichalopoulos c. Gr?ce (Papamichalopoulos c. Gr?ce (article 50) du 31 octobre 1995, s?rie A no 330-B, p. 59, ?? 36 et 39). Elle y a conclu ? une violation en raison d’une expropriation de fait irr?guli?re (occupation de terres par la marine grecque depuis 1967) qui durait depuis plus de vingt-cinq ans ? la date de l’arr?t au principal rendu le 24 juin 1993.
La Cour enjoignit en cons?quence ? l’Etat grec de verser aux requ?rants, ? pour dommage et perte de jouissance depuis que les autorit?s avaient pris possession de ces terrains en 1967, la valeur actuelle de leurs terrains augment?e de la plus-value apport?e par l’existence ? de certains b?timents qui avaient ?t? ?difi?s sur les terrains depuis l’occupation, ainsi que du co?t de construction de ces b?timents.
39. Compte tenu des consid?rations qui pr?c?dent, la Cour estime que dans la pr?sente affaire la nature de la violation constat?e dans l’arr?t au principal lui permet de partir du principe d’une restitutio in integrum.
A d?faut de restitution du terrain, l’indemnisation ? fixer en l’esp?ce devra, comme celle octroy?e dans l’affaire Papamichalopoulos ?voqu?e ci-dessus et concernant des d?possessions illicites en soi, refl?ter l’id?e d’un effacement total des cons?quences de l’ing?rence litigieuse.
40. S’agissant du dommage mat?riel, la Cour estime par cons?quent que l’indemnit? ? accorder aux requ?rants ne se limite pas ? la valeur qu’avait leur propri?t? ? la date de son occupation. Pour cette raison, elle a invit? l’expert ? estimer aussi la valeur actuelle du terrain litigieux. Cette valeur ne d?pend pas de conditions hypoth?tiques, ce qui serait le cas s’il se trouvait aujourd’hui dans le m?me ?tat qu’en 1970. Il ressort clairement du rapport d’expertise que, depuis lors, ledit terrain et son voisinage imm?diat – qui disposaient de par leur situation d’un potentiel de d?veloppement urbain – ont ?t? mis en valeur par la construction de b?timents, dont l’?cole.
41. La Cour d?cide que l’Etat devra verser aux int?ress?s, pour dommage et perte de jouissance depuis que les autorit?s ont pris possession du terrain en 1970, la valeur actuelle du terrain augment?e de la plus-value apport?e par l’existence du b?timent.
Quant ? la d?termination du montant de cette indemnit?, la Cour ent?rine les conclusions du rapport d’expertise pour l’?valuation exacte du pr?judice subi. Ce montant s’?l?ve ? 1 385 394, 60 EUR.
B. Dommage moral
42. Les requ?rants sollicitent aussi 100 000 000 ITL chacun (soit 51 645,69 EUR) pour le pr?judice moral qu’ils all?guent avoir subi.
43. Le Gouvernement fait observer qu’en l’esp?ce, le constat de violation repr?sente une r?paration suffisante.
44. La Cour consid?re que la violation de la Convention a port? aux requ?rants un tort moral certain, r?sultant du sentiment d’impuissance et de frustration face ? la d?possession ill?gale de leurs biens.
La Cour alloue ? chacun des requ?rants 50 000 EUR de ce chef, soit 200 000 EUR au total.
III. Frais et d?pens
45. Les requ?rants sollicitent le remboursement des frais et d?pens, notamment pour honoraires, frais d’avocat et frais de justice, d’un montant global de 288 679 741 ITL (149 090,64 EUR), montant incluant la taxe sur la valeur ajout?e, et se r?partissant ainsi :
a) proc?dure nationale : 163 896 627 ITL, soit 84 645,54 EUR, dont les honoraires s’?l?vent ? 129 956 640 ITL, soit 67 110 000 EUR ;
b) proc?dure ? Strasbourg : 124 783 114 ITL, soit 64 445,10 EUR, dont les honoraires s’?l?vent ? 83 208 000 ITL, soit 42 973 EUR.
46. Le Gouvernement s’en remet ? la sagesse de la Cour.
47. La Cour rappelle que l’allocation des frais et d?pens au titre de l’article 41 pr?suppose que se trouvent ?tablis dans leur r?alit?, leur n?cessit? et, de plus, le caract?re raisonnable de leur taux (Iatridis c. Gr?ce (satisfaction ?quitable) pr?cit?, ? 54). ). En outre, les frais de justice ne sont recouvrables que dans la mesure o? ils se rapportent ? la violation constat?e (Van de Hurk c. Pays-Bas, arr?t du 19 avril 1994, s?rie A no 288, ? 66).
48. La Cour ne doute pas de la n?cessit? des frais r?clam?s ni qu’ils aient ?t? effectivement engag?s. Elle trouve cependant excessifs les honoraires totaux revendiqu?s ? ce titre. La Cour consid?re d?s lors qu’il n’y a lieu de les rembourser qu’en partie.
Compte tenu des circonstances de la cause, et statuant en ?quit? comme le veut l’article 41 de la Convention, la Cour juge raisonnable d’allouer conjointement aux requ?rants un montant de 40 000 EUR.
IV. Frais d’expertise
49. Pour ses honoraires et les frais relatifs ? la r?alisation de l’expertise, l’expert signataire du rapport demande un montant global de 10 452,00 EUR, taxe sur la valeur ajout?e (TVA) et contributions sociales (CPA) en sus. Son calcul tient compte du travail d’estimation lui-m?me, des visites sur les lieux, de l’?tablissement des plans.
50. Le Gouvernement n’a pas fait de commentaires ? cet ?gard.
51. Les requ?rants ne se prononcent pas non plus ? ce sujet.
52. La Cour rappelle d’abord que l’octroi d’indemnit? rel?ve de son pouvoir discr?tionnaire et qu’il lui appartient de juger si telle indemnit? est n?cessaire ou appropri?e. La r?mun?ration de l’expert s’analyse en l’occurrence en des frais li?s ? la r?alisation d’une expertise que la Cour a jug?e indispensable afin de donner aux requ?rants la possibilit? d’obtenir l’effacement de la violation relev?e par l’arr?t au principal.
Sur les instructions de la Chambre, le greffier a du reste inform? le Gouvernement et l’expert que les frais et honoraires relatifs ? l’expertise incomberaient en d?finitive ? l’Etat d?fendeur (voir ? 8).
53. La Cour ne doute pas de la r?alit? et de la n?cessit? des op?rations que l’expert a accomplies pour s’acquitter au mieux de sa t?che. Elle estime ensuite que les sommes r?clam?es sont raisonnables. La Cour d?cide, en cons?quence, d’accorder l’int?gralit? de cette somme, ? savoir 10 452,00 EUR, augment?e de TVA et de CPA.
V. Int?r?ts moratoires
54. La Cour juge appropri? de baser le taux des int?r?ts moratoires sur le taux d’int?r?t de la facilit? de pr?t marginal de la Banque centrale europ?enne major? de trois points de pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, ? L’UNANIMIT?,
1. Dit, ? l’unanimit?,
a) que l’expertise est valide ;
b) que l’Etat d?fendeur doit verser aux requ?rants, dans les trois mois ? compter du jour o? l’arr?t sera devenu d?finitif conform?ment ? l’article 44 ? 2 de la Convention, les sommes suivantes :
i. 1 385 394, 60 EUR (un million trois cent quatre-vingt-cinq mille trois cent quatre-vingt-quatorze euros et soixante centimes) pour dommage mat?riel ;
ii. 200 000 EUR (deux cent mille euros) pour dommage moral ;
iii. 40 000 EUR (quarante mille euros) pour frais et d?pens ;
iv. tout montant pouvant ?tre d? ? titre d’imp?t sur lesdites sommes ;
c) que l’Etat d?fendeur doit verser ? l’expert, M. T., dans les trois mois, 10 452, 00 EUR (dix mille quatre cent cinquante-deux euros), plus TVA et CPA ;
d) qu’? compter de l’expiration dudit d?lai et jusqu’au versement, ces montants seront ? majorer d’un int?r?t simple ? un taux ?gal ? celui de la facilit? de pr?t marginal de la Banque centrale europ?enne applicable pendant cette p?riode, augment? de trois points de pourcentage ;
2. Rejette, ? l’unanimit?, la demande de satisfaction ?quitable pour le surplus.
Fait en fran?ais, puis communiqu? par ?crit le 11 d?cembre 2003 en application de l’article 77 ?? 2 et 3 du r?glement.
S?ren Nielsen Andr?s Baka
Greffier adjoint Pr?sident
ARR?T CARBONARA ET VENTURA c. ITALIE (SATISFACTION ?QUITABLE)
ARR?T CARBONARA ET VENTURA c. ITALIE (SATISFACTION ?QUITABLE)